Messages : 107 Date d'inscription : 17/05/2020 Alias : Lys / salomé (elle) Portrait : Saoirse Ronan (terpsykore), sign (astra / bazzart) Activité : La science dans le sang. Elle est chercheuse en botanique pour l'Orme. Fait partie de l'équipe qui a créé le terreau argent (Édith). Sous un autre nom elle est gardienne de la Serre du Grand Palais (Annie) En société : Noblesse déchue par l'impératrice. Ancienne famille noble respectée pour son savoir. Aujourd'hui luttant contre cette anarchie. Organisation(s) : Scientifique de l'Orme, l'organisation de son père. Petite princesse chercheuse qui essaye de donner une seconde vie à la nature. Elle travaille sur le terreau argent Besace : Un cahier de croquis, des fleurs séchées, un flacon de parfum, à la rose, une clé de détermination de botanique, un animautomate libellule piraté
Une rencontre à l'aube (Alceste & Édith) Mer 27 Mai - 14:32
Messages : 1365 Date d'inscription : 17/04/2020 Alias : appo (il) Facettes : philémon Portrait : harry lloyd + corvidae Activité : absurde activité qui semble se battre légalement contre le couvre feu. puisqu'il le faut puisque si un jour quelqu'un va dans l'espace il faudra bien lui servir de phare alceste allume et éteint les réverbères tous les jours à heures fixes. En société : petit prolétaire fonctionnaire qui fait ce qu'on lui dit tête basse. longtemps surveillé puisque huysmans l'état a bien vite décidé en riant qu'il n'avait pas la trempe ou les idées de ses parents et l'a laissé seul dans ses miasmes. Organisation(s) : et pourtant alceste une fois l'attention d'état perdue s'est offert à l'ordre du plomb puisqu'il n'avait rien d'autre à apporter que lui. Besace : clés allen, chiffons, allumettes, journal de son père, plumes cassées et rêves qui n'en sortent jamais
Re: Une rencontre à l'aube (Alceste & Édith) Ven 5 Juin - 22:43
de toute façon, me disais-je, un jour je le verrai moi aussi, face à face, et je n'en mourrai pas : l'idée qu'il y a un âge où la vérité tue répugnait à mon rationalisme.
mémoires d'un jeune fille rangée, simone de beauvoir
le huitième arrondissement : pas son préféré. le plus vide, le plus grand, le plus intimidant. avec ses grosses bâtisses de pierre imposantes qui semblent narguer quiconque ne prétend au luxe il exclut le prolétariat, nie sa saleté, fait oublier à la haute son existence même. dans un quartier pareil il est aisé de vivre sans savoir que la pauvreté existe quelque part. facile de se raconter n'importe quoi dessus, oh, ils n'ont juste pas de sorties le soir ou au contraire ils vendent tous leurs enfants ce sont des gens terribles, des monstres. les fables qu'on se raconte sur ce que l'on ne voit pas, ce qu'on ne connait pas, cette façon de se les approprier pour qu'elles cessent de faire peur. et pourtant dans le huitième arrondissement il y a le grand palais, bâtiment splendide et majestueux s'il en est. et s'il devrait être le pire pied de nez de la haute aux petites gens, alceste ne peut s'empêcher d'être fasciné par lui. il a ce menu privilège, de par son métier, de pouvoir s'en approcher bien près. trop couard pour coller son visage aux vitres, il jette de petits regards furtifs occupé à sa tâche, il cherche à percevoir un bruissement, une feuille, tente de percevoir un arbre dont il ne connait pas le nom, qu'il serait incapable de distinguer des autres, mais qui lui ferait du bien. il s'arrange toujours pour le mettre à la fin de son parcours. ça lui donne l'excuse d'y trainer sans en avoir l'air. s'arrange pour toujours avoir une excuse à sortir au cas où on lui demanderait, bien qu'on ne lui demande jamais. il sait bien qu'il pourrait sans doute être plus téméraire, tenter une percée, et qu'il ne lui arriverait pas grand chose. coller son visage à la vitre, sentir si elle est chaude ou froide, tenter de percevoir des odeurs inconnues. coller son visage un jour - il ne demande rien de plus.
il éteint le dernier réverbère du pont alexandre III distraitement. descend l'échelle sans écouter ses bras et ses épaules qui hurlent puisqu'ils hurlent toujours et qu'il ne peut rien y faire de toute façon. il sait le corps de l'ouvrier qui le lâche au fur et à mesure et s'y est résigné. à quoi bon y faire quelque chose si c'est inéluctable ? voilà une bonne maxime pour représenter la vie d'alceste.
au loin se profile une silhouette qui lui attire le coin de l'oeil sans qu'il sache se l'expliquer. elle est vaguement familière mais pas assez pour faire lumière immédiate dans son esprit. la silhouette se précise et il découvre les traits d'une jeune femme qu'il a rencontrée presque exactement au même endroit quelques semaines plus tôt, la dernière fois qu'il était assigné au huitième. il se permet de tourner la tête pour regarder franchement, et son nom lui revient. madame monian, bien sûr. il avait été trop timide pour lui demander ce qu'elle faisait là de si bon matin la dernière fois et s'en était voulu ensuite. voilà que la vie lui donnait l'occasion de se rattraper, ce qui est inespéré si l'on compare ce petit détail de vie avec l'immensité de paris. comme si le destin vous permettait de placer finement cette réplique spirituelle à une dispute qui nous était venue des heures plus tard. et de fait, elle se dirige vers lui. et même : lui adresse la parole. alceste est le dernier individu maladivement timide de france (du moins la vie tente souvent de lui donner cette impression, n'aidant en rien une amélioration éventuelle). madame monian - mais bien et vous ? il se trouve soudainement encombré par son barda comme s'il était débutant et qu'il s'agissait de sa première tournée. parler aux gens en service lui fait cet effet là les trois quarts du temps. le temps s'est radouci, il est plus agréable de travailler dans ces conditions. c'est joli de le voir comme ça, la vérité c'est que c'est juste un peu moins pire quand ça ne gèle pas. êtes vous simplement une promeneuse matinale ou vous rendez vous quelque part ? bénie soit l'éducation éclairée et polie que lui ont donné ses parents, sans laquelle il n'aurait sans doute jamais parlé. et même, fou ce matin, il pose son roseau et son échelle à terre, essuie ses doigts sur sa veste d'uniforme et tend la main.
Édith Maignan
Messages : 107 Date d'inscription : 17/05/2020 Alias : Lys / salomé (elle) Portrait : Saoirse Ronan (terpsykore), sign (astra / bazzart) Activité : La science dans le sang. Elle est chercheuse en botanique pour l'Orme. Fait partie de l'équipe qui a créé le terreau argent (Édith). Sous un autre nom elle est gardienne de la Serre du Grand Palais (Annie) En société : Noblesse déchue par l'impératrice. Ancienne famille noble respectée pour son savoir. Aujourd'hui luttant contre cette anarchie. Organisation(s) : Scientifique de l'Orme, l'organisation de son père. Petite princesse chercheuse qui essaye de donner une seconde vie à la nature. Elle travaille sur le terreau argent Besace : Un cahier de croquis, des fleurs séchées, un flacon de parfum, à la rose, une clé de détermination de botanique, un animautomate libellule piraté
Re: Une rencontre à l'aube (Alceste & Édith) Dim 21 Juin - 21:48
Messages : 1365 Date d'inscription : 17/04/2020 Alias : appo (il) Facettes : philémon Portrait : harry lloyd + corvidae Activité : absurde activité qui semble se battre légalement contre le couvre feu. puisqu'il le faut puisque si un jour quelqu'un va dans l'espace il faudra bien lui servir de phare alceste allume et éteint les réverbères tous les jours à heures fixes. En société : petit prolétaire fonctionnaire qui fait ce qu'on lui dit tête basse. longtemps surveillé puisque huysmans l'état a bien vite décidé en riant qu'il n'avait pas la trempe ou les idées de ses parents et l'a laissé seul dans ses miasmes. Organisation(s) : et pourtant alceste une fois l'attention d'état perdue s'est offert à l'ordre du plomb puisqu'il n'avait rien d'autre à apporter que lui. Besace : clés allen, chiffons, allumettes, journal de son père, plumes cassées et rêves qui n'en sortent jamais
Re: Une rencontre à l'aube (Alceste & Édith) Jeu 2 Juil - 19:55
de toute façon, me disais-je, un jour je le verrai moi aussi, face à face, et je n'en mourrai pas : l'idée qu'il y a un âge où la vérité tue répugnait à mon rationalisme.
mémoires d'un jeune fille rangée, simone de beauvoir
ce qu'il sent chez cette jeune femme l'émeut, sans pourtant qu'il sache mettre le doigt, qu'il sache nommer ce que c'est exactement. peut être une sorte d'insouciance, une façon d'être au monde, de s'offrir à l'aube. un pas qui s'est prévu en avance pour ne pas se presser, qui se permet de flâner non sans but. contrairement à tous les parisiens qu'alceste a pu croiser dans sa vie, elle n'est ni écrasée par un lourd fardeau permanent, ni complètement dilettante et oisive. cet équilibre là, si rare, il s'émerveille de pouvoir en être témoin dans ces heures sombres. peut être avait-il même oublié qu'il pouvait exister. non voilà, tout précisément cela lui vient quand elle le corrige sur son appellation. c'est tout ça mais c'est surtout sa capacité à profiter des petites choses qui l'entourent qui le touche. elle profite de l'aube. elle profite de la lumière et du soleil qui contre toute attente continue à se lever tous les matins. elle profite complètement de toutes ces choses que les parisiens ont pris pour décor négligeable à la fin de leurs enfances, souvent même avant. elle lui donne envie de jouer aux jeux des premières fois où l'on tente de tout vivre comme une chose inédite et donc délectable. alors il s'excuse de bonne grâce. il a dit madame par réflexe, parce qu'en étant dans le huitième il plie son esprit à la servitude, parce qu'appeler quelqu'un mademoiselle lui a toujours semblé trop audacieux.
facile de s'excuser d'une petite entorse, plus compliqué en revanche de choisir comment se présenter. il est malvenu d'être un huysmans partout, dans ce quartier particulièrement. on pourrait croire qu'à avoir trois noms de famille se présenter devient un palpitant moment de choix à la faveur de l'humeur, mais ses trois noms sont maudits. il ouvre la bouche et parce qu'il ne veut pas trop laisser de temps de latence pour ne pas être percé à jour en sort le premier nom qui lui vient à l'esprit. le premier nom qui n'est pas le sien. martel. monsieur martel. enchanté mademoiselle. derrière l'ombre de la silhouette de la terrible hélène dans sa vie il y a la lumière inextinguible d'agnès et leurs douces enfances. si ce choix sonne comme une évidence il sait bien qu'il ne s'agit que de s'enfermer dans une autre famille dysfonctionnelle.
c'est tout juste si la jeune femme ne s'étire pas en prononçant la phrase suivante. sait-elle qu'elle est extraordinaire ? qu'à son coeur aigri elle parvient à donner un sourire ? ça fait quelques années déjà que je suis témoin de toutes les aubes. j'en avais oublié de la regarder. et de fait il lève le nez, regarde les couleurs, le rose qui teinte par touches le smog, qui lui donne une allure encore plus cotonneuse, une allure de friandise de fête foraine. le vent, léger, secoue des chevelures imaginaires et passe vainement sur les bâtiments contre lesquels il ne peut rien. paris cesse d'être assistée, paris s'illumine elle même, et bientôt la foule battra le pavé. cette heure est une heure de flottement, d'élan avant la course, un moment d'apesanteur. je vous remercie pour cela. mais cette matinée ne semble pas être qu'esthétiquement magique. cette matinée, pour la première fois depuis bien longtemps, semble vouloir lui faire cadeau de surprises sur surprises. le voici donc face à la mystérieuse gardienne de la mystérieuse serre, objet de ses rêves obscurs et inatteignables soudainement offerte à sa curiosité dormante. trop de questions se bousculent en lui, à trop de niveaux; la fébrilité de l'enfance avide s'empare de lui, brise sa prison de timidité, l'anime d'un appétit monstre. ouvrir la serre ? en quoi ça consiste, gardienne de la serre ? est-ce que vous êtes...botaniste ? le mot met un temps à lui revenir. il fait partie de ce champ lexical oublié par les langues des rues. puisqu'une chose n'existe plus, pourquoi lui laisser un vocabulaire ? et vice versa puisque pour faire disparaitre une chose l'humain s'applique souvent à ne plus la nommer.
maintenant tout son corps hurle qu'il existe d'autres possibilités. qu'il est si proche, encore plus proche que d'habitude de la serre en parlant avec cette jeune femme. la chaleur du terreau humide l'appelle. le musc, le vrillé, toutes ces mille odeurs que son nez n'a jamais rencontrées. c'est découvrir qu'on parle avec une personne qui a fait le voyage dont on rêve depuis toujours, écrit le livre qu'on aime le plus au monde. c'est s'abreuver des songes qui semblent soudain émaner d'elle sans qu'elle en ai conscience, et ça suffit presque, il pourrait presque se contenter d'être face à elle sans avoir de réponse à ses questions. mais j'ai fini, je viens de finir, je... alceste le lent et posé réalise à peine les mots qui sortent d'entre ses lèvres trop agiles pour lui. je m'arrange toujours pour finir aux abords de la serre. ça me donne comme une excuse pour y trainer. il avoue et son empressement annule presque toute forme de honte à en faire la confidence. il s'aperçoit que peut être la silhouette qu'il a vue déambuler quelque fois dans la serre à travers les vitres presque absolument opaques c'était la sienne. l'existence comme le ciel semble se teinter d'une couleur nouvelle.
Édith Maignan
Messages : 107 Date d'inscription : 17/05/2020 Alias : Lys / salomé (elle) Portrait : Saoirse Ronan (terpsykore), sign (astra / bazzart) Activité : La science dans le sang. Elle est chercheuse en botanique pour l'Orme. Fait partie de l'équipe qui a créé le terreau argent (Édith). Sous un autre nom elle est gardienne de la Serre du Grand Palais (Annie) En société : Noblesse déchue par l'impératrice. Ancienne famille noble respectée pour son savoir. Aujourd'hui luttant contre cette anarchie. Organisation(s) : Scientifique de l'Orme, l'organisation de son père. Petite princesse chercheuse qui essaye de donner une seconde vie à la nature. Elle travaille sur le terreau argent Besace : Un cahier de croquis, des fleurs séchées, un flacon de parfum, à la rose, une clé de détermination de botanique, un animautomate libellule piraté
Re: Une rencontre à l'aube (Alceste & Édith) Dim 19 Juil - 17:53
Messages : 1365 Date d'inscription : 17/04/2020 Alias : appo (il) Facettes : philémon Portrait : harry lloyd + corvidae Activité : absurde activité qui semble se battre légalement contre le couvre feu. puisqu'il le faut puisque si un jour quelqu'un va dans l'espace il faudra bien lui servir de phare alceste allume et éteint les réverbères tous les jours à heures fixes. En société : petit prolétaire fonctionnaire qui fait ce qu'on lui dit tête basse. longtemps surveillé puisque huysmans l'état a bien vite décidé en riant qu'il n'avait pas la trempe ou les idées de ses parents et l'a laissé seul dans ses miasmes. Organisation(s) : et pourtant alceste une fois l'attention d'état perdue s'est offert à l'ordre du plomb puisqu'il n'avait rien d'autre à apporter que lui. Besace : clés allen, chiffons, allumettes, journal de son père, plumes cassées et rêves qui n'en sortent jamais
Re: Une rencontre à l'aube (Alceste & Édith) Lun 27 Juil - 12:35
de toute façon, me disais-je, un jour je le verrai moi aussi, face à face, et je n'en mourrai pas : l'idée qu'il y a un âge où la vérité tue répugnait à mon rationalisme.
mémoires d'un jeune fille rangée, simone de beauvoir
une excitation lui soulève la peau de milliers de petits picotements. quelque chose d'un frisson remonte le long de sa colonne vertébrale. c'est comme sortir d'un long sommeil profond - non, c'est sortir d'un long sommeil profond. une nouvelle possibilité de trajet et de vie se propose, et c'est même effrayant de soudaineté. alceste n'est pas un vrai débrouillard, pas un de ces virtuoses de la vie qui d'un sourire ou d'un bon mot peut parvenir à ses fins plusieurs fois par jour, et vivre par dessus les autres, et survivre comme dans un jeu, comme si à la fin ça ne faisait que recommencer à zéro, une foi aveugle d'éternité dont certains misérables font preuve et qui en deviennent des princes, foi qu'ils ne font que partager avec les plus riches qui eux l'expriment à l'égard du vif argent. on n'a pas supprimé la foi, se dit alceste devant édith, on lui a simplement ôté son dogme. l'humain est nul et non avenu sans foi et sans espoir, et le voici devant la jeune femme tout prêt à croire, à baisser sa garde, à jouer à ce jeu-là dont les règles sont simples : théoriquement, toute journée peut contenir son moment de bonheur. c'est une règle absurde, odieuse et qui semble parler pour ne rien dire - pourtant elle change tout.
il pense à tous ceux auxquels on ne montre jamais d'autre possibilités de réalité. ce qui sont enfermés dès l'enfance dans un modèle de vie et complètent leur existence sans savoir qu'il en existe d'autres, qui leur auraient été accessibles s'ils avaient voulu, s'ils avaient su. il songe à tous ceux qui auraient pu être de grands hommes et de grandes femmes s'ils avaient su que c'était possible. en même temps se demande : auraient-ils vraiment pu l'être ? est-ce que le destin n'est pas irrémédiablement régi par une forme de fatalité qui rend le conditionnel désuet et inutile ? il regarde édith et se demande comment, grandie dans le smog, elle a pu avoir l'idée de devenir botaniste. qui a pu lui dire, les plantes disparaissent certes mais il y a encore des gens pour prendre soin d'elles ? qui lui a appris les boutures, les tiges, les cycles ? à qui transmettra-t-elle ce savoir qui était déjà presque anachronique quand on lui a transmis ? de similitude avec le mien ? mais vous maintenez la vie ! vous empêchez la flore de disparaitre tout à fait ! moi je ne suis qu'un pantin avec un prétexte de métier ! la dernière phrase est à peine prononcée qu'il la regrette déjà. il n'a pas pour habitude de se confier, encore moins de se plaindre de son sort, et surtout pas avec une inconnue. c'est comme si la comparaison faite par la jeune femme lui avait été insupportable. quand son corps et son esprit reprennent un semblant de vie, c'est à dire rarement tant il est engoncé dans l'ambre de sa vie sans but, sa vie mécanique, le lyrisme de son adolescence s'empare de lui comme si l'ambre qui le rendait passif et survivant avait aussi figé dans le temps sa mentalité d'il y a dix ans, prête à bondir à nouveau dès que sa prison ramollit un peu. y'a-t-il des insectes dans la serre ? l'information lui semble d'importance capitale en plus d'être un bon moyen de changer de sujet. un vrai membre du plomb aurait plutôt bondi sur les plateaux de légumes préparés pour le palais. sur l'injustice du fait que toute cette vie soit dirigée vers les bouches et le profit des riches sans que la question se pose de partager avec les gens du faubourg. chaque jour la vie lui fait se dire qu'il a tort de se croire si peu révolutionnaire, qu'il a au fond la flamme en lui, puis lui rappelle qu'il est si passif, si peu en colère, trop anesthésié pour faire un bon rebelle.
je voudrais vous suivre. je ne demande pas mieux. mais cela ne va-t-il pas vous apporter des ennuis ? peut être a-t-il peur de lui même aussi. peur de ne pouvoir s'empêcher de croquer dans un fruit qu'il n'a jamais vu, de voler une fleur trop sublime pour le laisser sage. peut être a-t-il peur d'être pris lui, le fils huysmans, dans la serre impériale, et mis aux fers pour l'éternité. vous lisez la gazette ? vous avez entendu parler de cette histoire de terre au vif argent ? les plantes poussent...est-ce qu'a la serre, c'est ce que vous utilisez ? voilà un autre détour de son âme : voilà une phrase digne d'un membre du plomb. est-ce que le terreau est utilisé depuis l'ouverture de la serre, à l'abri des regards ? est-ce que ce qui dérange l'empire c'est que quelqu'un s'en soit emparé pour le rendre disponible à tous et montrer qu'avec un peu d'effort les plantes peuvent renaitre pour toute la france ? le miroir ne prenant jamais parti, n'ayant pas tous les angles de la chose, il était compliqué de se faire un avis. mais voilà qu'il avait la gardienne du grand palais devant lui, et qu'il pouvait accéder à des données peut être précieuses au plomb. cette rencontre catalyse tout, il se dit, et il frissonne dans l'air frais de l'aube.