i've polished this anger and now it's a knife (michelle)

caractère ◇ michelle la menteuse, michelle celle qui dissimule camoufle s'invente autre, michelle au coeur froid et vide, persuadée de ne ressentir aucune émotion autre que la peur ou la colère ou le mépris, aucune émotion autre que celles qui emplissent l'âme d'une couleur noirâtre aux allures mauvaises. depuis toujours, on lui a appris la nature dangereuse de l'humain, on lui a appris la dureté terrible du monde et l'infortune qu'est la vie : et si cela ne constitue pas chez elle une croyance certaine, elle s'est adaptée à cela, elle s'est façonnée elle-même à l'image de son père l'insensible, aux ambitions immenses et à la volonté d'acier, à l'esprit calculateur et aux mains agiles et sanglantes. femme brillante, glaciale, charismatique, hypocrite, manipulatrice ; âme rigide, âme-vipère.
la morale disparaît si les intérêts doivent la supplanter, et il n'est plus ni de bien ni de mal, il n'est plus que les désirs et les attentes de la princesse révolutionnaire, princesse clandestine et inconnue : si ses mains royales doivent s'entacher de suie ou de sang, ainsi soit-il ; rien en elle n'en sera bouleversé.
si elle se fait passer assez régulièrement pour tout ce que les autres attendent d'elle  (chaleureuse, attentive, sympathique, et d'autres qualificatifs qui font une bonne personne), ce n'est que pour trahir avec plus de majesté l'image trompeuse lorsque cela deviendra nécessaire à ses plans minutieux. michelle la belle illusionniste, michelle l'insaisissable, prédatrice dont la détermination ne connaît aucune faille.

(mais son esprit s'effraie de plus en plus de cette insensibilité, de cette empathie lacunaire, de cette rationalité supreme ; et secrètement, l'intensité de l'existence des autres qui l'environnent la terrifie et la plonge dans les abysses sombres du doute : ne sera-t-elle jamais capable de ça ?)


place en société ◇ son enfance a été marquée par le respect et l'admiration portés à son père, roi de la pègre guyanaise, seigneur de l'illégal dont nul n'aurait osé questionner le règne ; voilà qui elle était pour tous les regards qui la croisaient : la fille intouchable, l'enfant prodigieuse, l'héritière incontestée. la misère leur était alors si belle, et la fierté ressentie à l'idée de la dominer, de la tordre, de se l'approprier n'était que plus délicieuse parce que les tyrans métropolitains ne se doutaient pas un instant que de cette désolation sociale, de cette faiblesse assumée seraient forgées les armes de la rébellion.

ce n'est que lorsqu'elle est arrivée à la capitale française qu'elle a découvert la disgrâce de sa position : elle n'était princesse que des bas-fonds de son territoire natal éloigné. elle n'a eu de cesse à retrouver sa puissance effacée. c'est Aimée qui l'a introduite dans la haute société, qui lui a payé ses études, qui l'a emmené aux réunions professionnelles, qui l'a invité à des diners et réceptions aristocrates, ou au théâtre, ou que sais-je encore d'affriolant et hors de la portée de michelle alors. et bien que secrètement leurs camps soient ennemis, elle ne reniera jamais que cette femme lui a offert les accès au monde qu'elle désirait ardemment conquérir. maintenant, elle appartient à la bourgeoise parce qu'Aimée refuse que quiconque remette en question le droit de sa protégée à la lumière et au pouvoir.

réputation ◇ l'intransigeance et l'extrême précision, la stratégie la plus travaillée et le calcul le plus exact des rapports de force dans lesquels s'inscrivent ses actions : c'est ce qu'on retient d'elle lorsqu'elle participe ou dirige les missions du FLG ou de son groupe de pirates des nuages et des vents. pragmatique, réfléchie, les deux mots qui, professionnellement parlant, la définissent le mieux.

en revanche, en société, on murmure son charisme qui se pare d'ornements de mystère, on la raconte vive, drôle, on susurre son aura et son regard magnétique. elle fait discrètement tout pour se faire aimer, et cela fonctionne : les gens apprécient la surface qu'elle leur invente, sans chercher aucune substance, aucune matière, aucune réalité en dessous.


lieu(x) fréquenté(s) ◇ le grand paris le beau paris les salons les réceptions d'or et de voiles de paroles fausses clairsemés de l'hypocrisie nécessaire, le grand paris et ses musées ses bibliothèques ses palais cachés et ses humains étranges, surtout le soir. la journée, à l'aérogare bumey, il n'est pas mince tâche que d'être la main suprême qui autorise ou refuse l'envol, mais quel plaisir intense et ancré fort dans ses entrailles que de scruter le ciel et de le sectionner de mille et mille calculs. et en secret, parcourir les cieux, parcourir les rues sales noirâtres inconnues invisible pour rejoindre ses camarades, pour préparer leur révolution rêvée, leur apocalypse politique. mais n'aimerait-elle pas être simplement chez elle, sur la terre qui a accueillit ses premiers pas, ses premières chutes ? probablement.

journée type ◇ le sommeil bref couplé à l'envie de s'élancer sans tarder face à l'aube, elle se réveille rarement longtemps après le soleil, elle attrape une chemise un grand café et une fois ses yeux entièrement ouverts, elle les dirige, eux et une prière brûlante d'espoir, vers le ciel et son Empereur, son Créateur. elle s'apprête avec une élégance de la plus grande précision, dévale les escaliers, salue Aimée et s'enfuit vers les transports, le journal du jour à la main, pour se rendre à l'aérogare. elle s'occupe des plannings de vol, des rendez-vous pour vols spéciaux ou importants, des demandes diverses, des réclamations des employés, elle fait ouvrir les hangars, annonce les premiers départs, et enfin les choses se calment, le temps ralentit et le bruit de ses talons sur le sol s'amenuise, enfin elle s'assoit dans son siège, tout en haut de la tour de contrôle, et la routine prend une allure moins vive. quelques heures plus tard, quand il ne reste plus que les quelques personnes qui constituent l'équipe de nuit, elle embarque les documents qui contiennent les horaires et coordonnées des vols de nuit pour Ombeline, pour plus tard décider lesquels cibler lesquels éviter.
déjà son coeur rougeoie et s'anime des pulsations de l'adrénaline qui viendra doucement enflammer ses veines et son esprit quand l'équipage bandit clandestin reprendra ses échappées revendicatrices au travers des espaces aériens, sous les armatures de la nuit. mais en attendant ce moment, elle rejoint les bonnes gens qu'elle se doit de fréquenter, goûte leur bons vins et distille les bons mots qu'ils veulent entendre, en pensant à son père et à l'étrange mixture de fierté et de dégoût qu'il éprouverait en la voyant en cet instant, en pensant aux siens abandonnés par la fortune qui triment sous les coups de l'existence pour alimenter la métropole des abondances que cette dernière croit naturelle et légitime d'abuser.

rapport au vif argent ◇ une donnée de plus à prendre en compte dans ses petits plans de renversement du monde, une information utile mais qui ne la fascine pas : rationalité et recul comme face à n'importe quel autre outil qui pourrait passer dans ses mains ou celles de ses alliés.


spiritualité ◇ l'humain est mauvais ; si cela n'est pas applicable à une personne, c'est qu'elle ment, ou elle n'a jamais eu l'occasion d'éveiller la folie féroce qui se tapit dans les bas-fonds de son âme. c'est tout, et c'est ainsi, et la solitude et la misère sont les seules choses qui attendent les hommes s'ils ne se reposent que les uns sur les autres.
la seule manière de connaître la sécurité, la confiance, la compréhension, l'apaisement c'est de s'abandonner yeux fermés, inconditionnellement confiant dans le giron de celui qui a tout créé, qui voit tout, qui comprend tout et accepte même les coeurs les plus sales. la seule manière de surmonter la terreur, la souffrance, les brisures engendrées par les aspérités de l'existence, les trahisons et les chutes et le tragique, c'est de se réfugier dans les murmures de Dieu, qui de son omniscience et omnipotence répand en chacun de ses fidèles un diffus sentiment, une brume d'espoir qui transcende et rassure le pêcheur perdu dans sa détresse. michelle sait bien, comme une conviction inébranlable au plus profond d'elle-même, que la violence condamne le sort des hommes ici-bas : seul Dieu offre le salut.
c'est son père qui lui a transmis cela, et ensemble ils partagent confidentiellement leur foi leur piété, qui est peut-être aussi immense et grandiose que leurs ambitions. son père, et Dieu, les deux uniques en ce triste monde vers qui elle dirige son amour, presque inconsciemment.