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 Le passé qui nous hante est un jardin vivant. (Bonnie)

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Agnès Martel
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En société : Clandestine au quotidien, on tolère sa présence dans le monde comme une étrangeté, et puis on hausse les épaules et on poursuit son chemin.
Organisation(s) : la Tour de Babel, une évidence.
Besace : Quelques tracts de la Tour, des baumes et onguents de chez Marguerite et Fernande, sa coiffe qu'elle ne porte pas en public.

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Le passé qui nous hante est un jardin vivant. (Bonnie)    Lun 11 Mai - 16:38

Un oiseau chante je ne sais où. C'est, je crois, ton âme qui veille.
Les mois ont passé, les saisons. Mais moi je suis resté le même.
Qui aime, qui attend que vienne le printemps,
Qui aime, qui attend de reconnaître un jour le printemps.

(Feu! Chatterton, Souvenir)

@BONNIE THELLIER + @AGNÈS MARTEL


Le noir a remplacé le bleu religieux de la tenue d'Agnès. C'est un noir passé, dont les nombreux lavages ont fini par atténuer la profondeur. Presque du gris sombre, en réalité, comme un parfait camouflage dans le ciel parisien obscurci par les nuages opaques de fumée et de pollution. La robe, simple mais élégante, a été cédée aux Sœurs par la famille Cortenbach, donateurs en secret, échange de bons procédés. Elle est un peu trop courte pour la grande Agnès, atteignant à peine ses chevilles, bien heureusement cachées par des bottines usées elles aussi. La vie de clandestine lui a appris à vivre chichement, et elle s'en accommode bien.

C'est la première fois depuis des mois - ou sont-ce des années ? - qu'Agnès quitte l'habit de diaconesse. La robe sombre et près du corps offre un contraste saisissant avec sa tenue habituelle, large et confortable, à laquelle elle s'est faite sans difficulté. Mais le deuil exige le port du noir. C'est un principe auquel il ne faut déroger, ancré dans des siècles d'une culture inamovible. Jamais Agnès n'aurait, qui plus est, osé prendre le risque du port d'un vêtement religieux dans un cimetière : la provocation était inutile, et le danger toujours présent. Si la Tour de Babel ne fait pas office de première menace auprès de l'Empire, rien ne sert cependant moins la cause que d'aller en agiter des symboles juste sous son nez, se dit-elle. Elle s'en est donc bien gardée, enfilant à grand peine l'étroite robe sombre, ornée de satin et de dentelles. Un style résolument différent qui la rappelle bien des années en arrière.

Dans le cimetière, un petit groupe silencieux s'est rassemblé. Agnès y reconnaît certains visages familiers : des oiseaux de passage, comme elle, chez celle que l'on appelait en plaisantant la Mère Bonnet. Elle lui avait ouvert sa porte autrefois, à elle et à d'autres. Agnès se souvient de l'annonce dans le journal quotidien, quelques mots à peine à la page nécrologique, sur cette bourgeoise qui s'était entichée des gamins populaires. Une phrase en souvenir, une date et un lieu pour son inhumation ; elle avait déchiré la note et l'avait précieusement gardée, jusqu'à ce jour. Réunis autour de la sépulture, celles et ceux qui lui doivent tant, en un dernier hommage sobre mais sincère. De l'autre côté du petit groupe, Agnès repère Bonnie : colocataire, camarade de galère, et puis amie. La cérémonie suit son cours - elle ira la saluer ensuite.
On prononce des mots, des souvenirs et des louanges, et puis l'on recouvre de terre le cercueil bientôt enfoui. Le recueillement se poursuit dans un silence de plomb, et Agnès, malgré les dix ans qui la séparent de celle qu'elle était alors, sent son cœur se serrer.

Elle finit par redresser le visage à la recherche des yeux de Bonnie, qu'elle espère encore croiser. D'un regard, balaie l'assemblée. Ne la voit pas. Serait-elle si vite partie ?
Rapidement, une silhouette au loin la détrompe. Là-bas, son amie auprès d'une tombe : ici l'on a tous quelqu'un à veiller. Elle s'en approche, foulant de ses pieds la terre humidifiée par la pluie finie qui s'abat sur la scène.
« Bonjour Bonnie, » elle lui dit doucement. Agnès reste à distance pourtant, comme pour préserver l'intimité de celle avec qui elle partageait tout autrefois. Que le temps a passé, se dit-elle. Sur la stèle, ce n'est pas le nom - inconnu - qui l'interpelle, mais bien la date du décès, encore récente, comme gravée depuis peu. « J'aurais préféré te retrouver en d'autres circonstances, » finit-elle par lâcher, désemparée.


Dernière édition par Agnès Martel le Mer 27 Mai - 12:10, édité 1 fois
Bonnie Thellier

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Activité : Bijoux aux bouts des doigts, délice des mains, l'œil pointu dans la structure du diamant, confectionner les plus beaux apprêts, amour de l'art et de la matière. Joaillière, Orfèvre
En société : Roturière des bas-fonds, clamant son innocence dans un silence. Activiste de l'ombre, portant à plus haute échelle l'humain que le dédain.
Organisation(s) : Assistante de l'ombre, dans l'Orme, elle voue entière espoir et confiance.
Besace : Quelques opales, des tiges d'argents, un paquet de gitanes pour abîmer un peu plus ses poumons.

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Re: Le passé qui nous hante est un jardin vivant. (Bonnie)    Jeu 14 Mai - 18:48

 Le passé qui nous hante est un jardin vivant.
Agnès & Bonnie

« Mais il savait que les rencontres sont rarissimes, celles qui émeuvent, transforment et tracent une frontière sur le temps pour qu'il y ait un avant et un après. Yves Simon.»
Hélichryse. Autrement dites l’immortelle. Cette rare fleur, venue d’ailleurs, paradis que l’on ne retrouve plus sous les poussières de la ville, beautée cachée, beauté perdue. Restées à jamais dans les souvenirs, dans les livres oubliés, tout un tas de plantes et de fleurs, ignorées, par dédain ou par envie. Mais Bonnie, l’âme nostalgique, fouine et conserve ces runiques du passé, espérant les raviver, renaissance dans le métal brûlant. C’était l’occasion, l’aubaine parfaite pour l’immortelle. Une plaque ni trop grande ni encombrante, ancrée par la perte et le deuil. C’était l’occasion de rendre un dernier hommage, à ce qui aurait pu s’apparenter à une amie. Du moins, une main tendue, un filet de sécurité dans les profondeurs d’un quartier agité. Mme Bonnet, celle qui avait si bien connu l’avant, celle qui contait les récits d’autrefois mieux que quiconque.

Souvenirs éveillés, au coin du feu, dans la chaumière de l'hôte six pied sous terre,  main dans la main avec l’amie perdue, à tendre l’oreille sous les paroles bienveillantes. Souvenirs trépassés, se retrouver désemparée à l’idée d’y penser.
C’est ainsi, que Bonnie,  l’âme en peine, à raviver une autre vie, la vie d’avant, celle où douceur juvénile venait donner un sens au quotidien, s’habilla pour l’occasion. Un enterrement, rien de bien voyant, un jupon noir charbon, rien de bien folichon. Se confondre dans la masse nocturne, celle qui, pour une dernière fois venait offrir un peu de coeur à cette dame des bas-fonds.
Le père Lachaise, un lieu, qui tristement, devenait habituel à ses visites. La grisaille qui s’en dégagea, dessinait un peu plus la noirceur des traits de Bonnie, contrastant un peu plus avec le foulard noir et l’écru de sa chevelure. Une poignée, seulement une poignée, s'interrogea Bonnie. Alors, qu’elle en avait tendu des mains, qu’elle en avait aidé des gens. Glisser son regard, sur des visages familiers, sur des inconnus, sur des oubliés. Elle croisa le tien, celui qu’elle ne pensait pas revoir, mais en même temps, ne fut pas étonnée de te retrouver ici. Tu as toujours eu cette lueur d’humanité, pour ne pas déserter.

Quelques mots, quelques larmes, la perte s’abat et hante les rangs en silence, offre une minute de recueillement pour s’endeuiller tristement. Une fois la terre rabattue, Bonnie vient y déposer la plaque sous les yeux fugaces des proches et connaissances. Un pas en arrière, besoin de prendre un peu d’air, la gamine décide de se rendre sur sa tombe à lui. A quelques mètres de l’assemblée, elle se rend, tête baissée.

Un morceau de pierre, une gravure bien grossière. Il méritait mieux, ils méritent tous, mieux. Ne serait-ce qu’un bouquet de fleurs, qu’une simple bouture. Un petit quelque chose, qui même fané, ne permet pas d’oublier. Alors qu’elle te tourne le dos, ta voix vient donner un peu d’espoir dans son coeur, ta voix vient réchauffer cette matinée mal commencée. Ravalant une larme, un cristal glissant sur sa joue, elle te murmure du bout des lèvres.

“Dis, tu te souviens de cette journée pluvieuse, près du feu, où elle nous racontait des histoires à dormir debout ? Qu’est-ce qu’elle a pu nous en dire, des sottises.”


Elle se tourne, te faire face, c’est la moindre des choses, même si la gloire et l’éclat n’y sont pas. Un léger sourire en coin à l’idée d’évoquer cet élan de nostalgie, celui bien trop enfoui.

Il est bon de te revoir Agnès, même si les circonstances sont des plus déplaisantes. Comment vas-tu, depuis le temps ?”
Elle reste plantée là, avec cette tenace envie de te sauter dans les bras. Mais ce n’est pas, ce n’est plus comme avant, l’eau a bien trop coulé sous les ponts. Et c’est peut-être, grâce à ce moment, qu’elle réalisa à quel point tu lui as manqué.

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Activité : Religieuse, sage-femme, faiseuse d'anges - la sororité en étendard.
En société : Clandestine au quotidien, on tolère sa présence dans le monde comme une étrangeté, et puis on hausse les épaules et on poursuit son chemin.
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Re: Le passé qui nous hante est un jardin vivant. (Bonnie)    Mer 27 Mai - 12:08

tw : mort, maladie

Les cimetières ont ce quelque chose de figé dans le temps, symboles à eux seuls de tous ceux qui gisent en ses terres, corps mêlés aux racines, à la terre épaisse et lourde, chargée peut-être des larmes de ceux qui la foulent là, juste au-dessus. Il paraît qu'autrefois c'étaient des lieux où poussaient les arbres, dont les branches venaient enlacer les tombes. Aujourd'hui, de verdure il n'y a plus, depuis longtemps. Les demeures éternelles ont été les premières dépouillées de leurs feuillages, quand il a fallu brûler pour chauffer les usines et les maisons des vivants.
Ce sont des endroits lugubres, malgré les quelques tentatives d'ornements et de couleurs, bien pâles cependant quand on pense aux fleurs d'antan que l'on ne connaît plus qu'en peintures.

Vêtue en noir, comme le veut la tradition, Bonnie aurait presque pu se mêler à la morosité ambiante. Mais son teint lumineux et son allure vive la distinguent de cet univers du poussière. Si ses yeux sont rougis d'avoir pleuré, elle n'a pas vraiment changé. Sa voix, faible, trahit son émotion, et Agnès suppose qu'elle pleure d'autres âmes que celle de leur hôtesse d'autrefois. Car le deuil est devenu chose tristement commune. Agnès ne peut sauver tous les malades de Paris, et ce n'est pourtant pas faute d'essayer. Dans les profondeurs de ce cimetière, reposent femmes mortes en couche et nourrissons aux premiers souffles empoisonnés par le smog qu'elle n'a su délivrer de leurs fardeaux.
Aujourd'hui, on pleure Madame Bonnet. Et demain ?

Bonnie rappelle Agnès à leur passé commun, lui arrache à sourire à l'évocation du souvenir. « Qu'est-ce qu'elle a pu radoter... Tu te souviens de l'histoire du type qui avait séjourné dans notre chambre ? Celui dont elle disait qu'il ressemblait au Capitaine Crochet ? Elle était persuadée que c'était un vrai pirate, » lâche-t-elle avec un petit rire. La Bonnet, comme elles l'appelaient, avait été un peu comme leur grand-mère, narrant des histoires d'un autre temps. Une, deux, trois fois, sans que jamais ni Bonnie, ni Agnès, n'ose lui dire connaître le récit. En s'échangeant des regards complices, elles l'écoutaient encore et encore, engourdies par la chaleur du feu après une journée dans le froid mordant.

Élan de mélancolie qu'elles partagent quand leurs yeux finissent par se croiser. Depuis le temps. Les trois mots ont la saveur douce-amère des retrouvailles teintées du lointain, comme si le mur invisible des jours d'absence les empêchait de se serrer dans les bras.
« Ça va. Je suis toujours chez les sœurs, » lance-t-elle, annonçant par la même que sa situation n'a pas changé. Peut-être peut-on prétendre alors que rien n'est vraiment différent ? « Et toi, que fais-tu désormais ? » Agnès voudrait lui demander qui est l'homme qui dort sous leurs pieds, la réconforter ensuite, retrouver la chaleur de son amitié. L'aider seulement, elle dont les mains savantes soignent les maux du corps au quotidien. Ceux du cœur, eux, lui sont plus difficiles d'accès. Patiemment, de ses attentions silencieuses, elle rafistole les plaies et en panse les cicatrices.
Auprès de Bonnie ce n'est pourtant plus sa place, se dit-elle. Alors, elle se tait.

Sur leurs visages tombe maintenant une pluie fine, de celle qui sait cacher les larmes des endeuillées.
Bonnie Thellier

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Activité : Bijoux aux bouts des doigts, délice des mains, l'œil pointu dans la structure du diamant, confectionner les plus beaux apprêts, amour de l'art et de la matière. Joaillière, Orfèvre
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Re: Le passé qui nous hante est un jardin vivant. (Bonnie)    Sam 30 Mai - 18:14

 Le passé qui nous hante est un jardin vivant.
Agnès & Bonnie

« Mais il savait que les rencontres sont rarissimes, celles qui émeuvent, transforment et tracent une frontière sur le temps pour qu'il y ait un avant et un après. Yves Simon.»
Couleur amère, aigreur du temps écoulé. On en verrait presque les fantômes, les feux follets à la nuit tombée. Cet endroit avait ce qu’il y a de plus froid, mordant l’échine d’un frisson glaçant. Les silences des veuves, des enfants déchus, des parents esseulés. Voilà, ce qui hantait le Père-lachaise, les pleures lugubres des amants d’antan. La terre noire, tombes de pierres en ruine, les noms gravés, fendus par le temps, trop pauvre pour recoller les morceaux. Ce qui autrefois, aurait pu devenir un jardin d’hiver, aux arbres tombants dans les allées fleuris, ce n’était plus qu’un désespoir, fade et sans la palette de couleur que les fleurs apportaient. Triste, comme les yeux de Bonnie.

Mais tu es là, avec cette chaleur dans l’azur de tes yeux, avec cette flamme qui émane de ton coeur, réconfortante et affectueuse à la fois. Tu l’as toujours été Agnès, cette épaule pour pleurer, mais jadis, les maux n’étaient pas si lourd à supporter. Alors, Bonnie, elle ne veut pas t’encombrer, elle se dit, que tu as déjà bien de choses à affronter.
Alors, que ce sourire se glisse sur ses lippes amères, évocation passagère, souvenirs enfouis profondément, elle te regarde, moins grisonnante qu’avant.

“Avoue que t’en as frissonné quand même ? Elle avait un don pour mettre une touche dramatique dans toutes ses histoires. Si faut, elle était comédienne dans sa jeunesse. “

Rire enfoui, au fond de sa poitrine. Une envie de rire, de piailler comme avant, de retrouver l'innocence que vous aviez, dans la chaumière de La Bonnet. Au coin du feu, dans les ruelles du faubourg, quand elle t’en faisait découvrir les coins et recoins, les chapardages à la volée, la liberté de la jouvence du printemps. Vous étiez belle, affranchies et évadées, vous étiez libérées des tourments du présent.

Les soeurs. Voilà qu’en vient un sujet, autrefois épineux. Elle n’avait pas compris, Bonnie, mais maintenant, l’esprit ouvert, le peu de recul de ces quelques années, lui permet d’accepter, de comprendre pourquoi. Elle ne veut pas rentrer dans les détails, elle ne veut pas te fâcher, maintenant qu’elle t’a retrouvé. Elle acquiesce, heureuse que tu te portes bien, lèvres qui meurent d’envie d’en savoir plus. Elle voudrait tout savoir, franchir cette barrière de l’immuable qui stagne entre vous depuis trop longtemps. En vient à ta question, c’en était presque surfait avec tout ce qu’il s’était passé. Des banalités couvrant des fatalités.

“Et bien.. J’ai ouvert une petite boutique, rue de l’ange, pour vendre mes bijoux. Ça marche assez pour me faire quelques francs. ”

Elle voudrait t’en dire plus, elle voudrait te parler de l’Orme, elle voudrait te parler de Jon. Tout te raconter, les démons qui la tourmentent, que tu pourrais peut être sauver, toi aux mains guérissantes, les maux du coeur sont-ils vraiment différents des maux du corps ? Tu l’as connu, comme personne, tu l’as guidée sans même le savoir, et elle t’a aimé, assez pour ne pas t’oublier dans les flots lointains.
Un regard en arrière, la tombe de l’amant, le coeur en pierre. Elle voudrait s’enfuir, sans un mot, partir au loin, sans se retourner. Mais tu es là, et inconsciemment, elle ne veut pas te perdre une seconde fois, pas encore une fois.
“Veux-tu qu’on marche quelques minutes Agnès ? Ce serait un plaisir d’écouter un peu plus ta voix…”

Elle te tend le bras, une invitation, un besoin de compenser sa peine sous les fines gouttelettes qui glissent sur vos visages, sous la fine pluie qui vient accompagner votre désolation.




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Re: Le passé qui nous hante est un jardin vivant. (Bonnie)    Jeu 4 Juin - 11:57

Rien ne distingue les souvenirs des autres moments :
ce n'est que plus tard qu'ils se font reconnaître, à leurs cicatrices.

(Chris Marker, La Jetée)
@Bonnie Thellier

Il y a dans les voix qui vieillissent quelque chose qui se casse. Les notes aigües de l'enfance finissent par faire place à des soupirs et des silences, les cordes vocales fatiguées elles aussi par une vie de smog. Chez Bonnie, la brisure est d'autant plus palpable que son regard est triste, et Agnès sent bien qu'il y a là une histoire qui n'est plus la sienne, qui lui échappe désormais tout à fait. Les rires cristallins d'autrefois ont laissé place à l'évocation nostalgique d'un temps qui n'est plus. C'était comme les couvertures chaudes que les deux camarades de chambres rabattaient sur elles-mêmes les jours les plus froids venus ; un réconfort épais, qui vous coupait tout à fait du reste du monde. De ces nuits-là, Agnès retient les longues heures à bavarder, les insomnies vouées à des discussions incessantes, le sentiment de l'urgence de raconter quand tout pourrait attendre. La lutte contre la fatigue et le sommeil, imperceptibles alors.

A l'évocation des talents de narratrice de la Bonnet, Agnès confirme. « Elle était incroyable ! » Elle se souvient des récits que leur logeuse faisait, des trémolos dans la voix, éclairée seulement d'un feu qui décline, marquant chaque pli de son visage. « Elle aurait fait une actrice remarquable, » finit-elle par conclure. Un ange passe, et toutes deux se perdent sûrement un instant à imaginer la femme qui les hébergeait sur les planches. Peut-être était-elle plus âgée chez Agnès que chez Bonnie, ou bien son maquillage différait-il. Peut-être jouait-elle une pièce dramatique, ou était-ce un opéra-bouffe ?
La religieuse se dit alors que l'on ne sait jamais vraiment ce que les autres pensent, et contemple cette idée un instant, avant que Bonnie ne vienne briser le silence.

Rue de l'ange, c'est un joli nom. Agnès sourit : les choses ont l'air de bien se passer pour elle. A l'invitation de sa camarade, elle hoche la tête. Elle aussi, veut suspendre un peu plus l'instant de leurs retrouvailles. Partager les histoires d'avant, en découvrir de nouvelles, celles du présent.
Ensemble, elles se lancent dans les allées bordées de stèles en hommage à ceux qui ne sont plus. Elles auraient presque l'impression d'être seules, comme les dernières survivantes sur cette terre meurtrie. Ultimes créatures arpentant les chemins gris et désertés, anges vêtus du noir du deuil.  « Je suis heureuse pour toi. J'aimerais voir ta boutique, un jour. Tu la tiens seule ? » Agnès demande, curieuse, désireuse aussi de savoir qui sont les visages qui peuplent désormais la vie de Bonnie, puisque le sien n'en fait plus partie.
Bonnie Thellier

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Re: Le passé qui nous hante est un jardin vivant. (Bonnie)    Dim 14 Juin - 19:51

 Le passé qui nous hante est un jardin vivant.
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« Mais il savait que les rencontres sont rarissimes, celles qui émeuvent, transforment et tracent une frontière sur le temps pour qu'il y ait un avant et un après. Yves Simon.»
Aux couches âcres qui composent l’âme, qui enveloppent le coeur, comme un artichaut aux mille feuilles. Il faut les enlever, une par une, patiente, pour atteindre le tant attendu, pour pouvoir y déceler, peu à peu, ses profondeurs. Tu avais eu cette patiente, autrefois, tu avais su découvrir cette carapace, de la jeune fille prude, de la gamine au doux visage. Les pas retentissants des mirages du passé, aux souvenirs vaporeux, qu’on n’ose oublier. Une part de réconfort, à cette idée, que ces images resteront gravées.
Quelques secondes, quelques secondes où les pupilles azurées, cherchent, farfouillent dans les tiennes, retrouvant un peu l’Agnès d’avant, celle qui, bras sous bras, maquillage dans les cils, lui racontait tous les ragots de l’Apollonide. Celle qu’elle considérait plus comme une soeur qu’autrement. Si juste, une fraction de minute, elle pouvait, de nouveau ressentir cela, alors elle prendrait, Bonnie, elle prendrait cette demie minute en ta compagnie.

Côte à côte, deux silhouettes sombres, comme l’atmosphère régnante sur le Père-Lachaise, quand l’inconscient se reflète dans les nuages. Quelques pas, les bottes en accolades, vous vous éloignez, loin de lui, loin de son passé. Alors, elle ose, elle ose un dernier regard envers la pierre, laissant derrière elle l’esquisse d’un heureux passif. Peut-être qu’elle ne voulait pas que tu le voies comme ça. Que pour ta première rencontre avec Jon, ce ne soit pas dans de telles circonstances. Il avait entendu parler de toi Jon, il en avait entendu, des histoires sur ton sujet. Sur la Bonnie d’avant, sur son acolyte d’un temps. Elle ne s’en lassait pas autrefois, car avec toi, c’était des rires, c’était des pleurs, c’était des aventures qu’elle s’aimait raconter, tout comme la mère Bonnet. Se prenant parfois, des faux airs de conteuse, abusant des anecdotes, extrapolant vos déboires d’antan. Alors, si toi aussi, tu pouvais avoir cette image de lui, autrement, que celle d’un mort, autrement que cette blessure au fin fond du coeur, ce serait mieux ainsi.
Tes paroles la ramenèrent à la réalité, appuyant un peu plus ce temps présent, celui qu’elle devrait savourer, sinon de regarder en arrière.

“Et bien, ce serait un plaisir de te faire visiter. C’est pas très grand, c’est même minuscule, mais je la loue pour une misère. J’y ai une chambre à l’étage.. Enfin, voilà. j’ai trouvé mon chez-moi, maintenant. “


Après que tout cela arrive. Se reconstruire. Elle avait l’impression qu’une décennie était passée, depuis toi. Qu’elle avait vécu mille vies, et qu’elle en était à sa dernière. Glissant un regard vers toi, esquissant un sourire timide.

“Oui.. Je suis toute seule, maintenant. Tu sais que je n’ai jamais eu besoin de personne pour m’en sortir. Tout comme toi.”


Plus franc, cette esquisse qui se dessinait sur ses lèvres. Évoquer votre ardeur, votre ténacité, points communs que vous saviez partager. D’une certaine manière, c’était une façon de se voiler la face, de déguiser le vague à l’âme. Les allées sépulcrales, aux pierres abîmées défilent derrière vous. S’échapper loin, de l’anesthésie de ces lieux, mais cette fois-ci à tes côtés.

“Voudrais-tu que je t'emmène aux jolis métaux ? Tu avais quelque chose à faire dans l’immédiat ?”  

Elle avait tant à te demander, elle avait tant de questions à te poser en retour. Alors que les pas cessèrent, attendant ton consentement. Elle ne savait quoi te proposer, Bonnie, pour te garder encore quelques secondes à ses côtés.





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Re: Le passé qui nous hante est un jardin vivant. (Bonnie)    Mer 1 Juil - 13:18

A la porte des Enfers, Orphée se retourne et regarde son amante, Eurydice disparaît, et le temps passé ensemble ne devient alors, plus qu'un souvenir.
Dans le regard que Bonnie glisse, en coin, sur la stèle en pierres dont elles s'éloignent, il y a ce même besoin de voir, une dernière fois. C'est dans ce geste, dans ce cou qui s'incline à peine presque comme une discrète révérence, que réside tout l'amour que la jeune femme éprouve. Elle aussi, elle se souvient ; elle, pourtant, n'a pas eu le choix que de voir l'être aimé s'éloigner à jamais.
Agnès perçoit l'émotion qui perce le cœur de Bonnie, sans bien savoir comment en résorber la plaie. Elle se dit alors que le mieux qu'elle puisse faire est de rester avec elle, l'écouter, parler. Broder leurs robes sombres du fil coloré de leurs mots.
Ensemble, les deux femmes s'avancent vers la sortie du cimetière, laissant derrière elles les pierres et les milliers de noms gravés. A l'invitation de son amie d'autrefois, c'est un sourire qui vient se dessiner sur le visage d'Agnès. L'idée même de faire un pas, ne serait-ce que minime, dans le nouveau monde de Bonnie, suffit à la réjouir. Peu à peu, le mur entre elles s'affine, et peut-être finira-t-il par tomber complètement.

« Tu es impressionnante, Bonnie. Mais je ne suis pas surprise que tu aies réussi, » finit par lâcher la religieuse avec un sourire en coin, tandis que la jeune femme lui détaille ce qu'elle est parvenue à mettre en place en seulement quelques années ; et toute seule, comme elle le souligne. Elle a toujours eu une pugnacité qu'Agnès lui admirait, une volonté de fer qui parvenait à la mettre toute entière en mouvement. Elle a toujours pensé à elle comme une inspiration, et n'est donc pas étonnée de voir ses rêves se réaliser.
« Je suis toute à toi, allons-y ! » Elle répond d'un ton enjoué, heureuse d'être invitée à redécouvrir l'univers de Bonnie, qu'elle a toujours tant aimé. Dans leur jeunesse, l'orfèvre aimait à partager ses anecdotes du jour avec elle ; et Agnès écoutait, sacrifiant parfois ses heures de sommeil au profit de longues discussions.

Ensemble, elles se dirigent vers le tramway le plus proche. Un silence règne, plus serein cette fois, confortable, comme on se satisfait simplement de la compagnie d'une personne chère à son cœur - sans besoin de mots pour le dire. La pluie se fait plus dense et comme un heureux hasard, le véhicule arrive. Les voilà qui s'engouffrent dans le wagon, déplaçant leurs retrouvailles vers l'île où toutes deux résident. Ainsi, peut-être les rendent elles plus pérennes : ce ne sont plus seulement quelques mots échangés dans un cimetière, mais bien une après-midi en compagnie l'une de l'autre. Elles s'installent sur deux petits fauteuils, tandis que la ville commence à défiler autour d'elles. « Quand j'y pense, c'est incroyable que nous ne nous soyons pas croisées plus tôt. Nous sommes toutes proches, finalement ! » Et la pensée de l'avoir toute proche lui réchauffe le cœur encore un peu plus.
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Le passé qui nous hante est un jardin vivant. (Bonnie)
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