D’un pas décidé, Léontine grimpa les marches de l’Opéra, laissant claquer de rage ses petits talons. Sans prendre la peine d’expliquer la raison de sa venue, elle emprunta le chemin des coulisses à la recherche d’un visage bien précis. A sa vue, quelques danseuses qui s’entrainaient se mirent à murmurer quelques commentaires, avant de finalement reprendre leur activité initiale. Sur l’une des barres de la pièce, la chevelure flamboyante d’Héloïse Lombard dodelinait en suivant ses mouvements, avant de s’arrêter brusquement. Sans aucun doute, la danseuse se trouvait plus que surprise de cette venue impromptue, à la vue de tous. D’ordinaire assez nonchalante, l’employée des thermes semblait habitée par une colère sans mesure, qui se lisait sans le moindre soucis sur son visage. Plus elle s’approchait de son ancienne amie, plus elle paraissait vouloir la mordre,avant de finalement lui coller sa main dans la figure, avec un claquement qui raisonna dans la pièce.
Le silence qui suivit paru durer des heures, avant d’être brisé par la voix de la blonde.
— Tu es vraiment une sale peste. L’amertume lui encombrait la voix, et laissait sous-entendre la gravité de la situation. Consciente d’avoir des spectatrice, Léontine se retourna en direction des danseuses avant de leur indiquer la porte.
— Dehors. La surprise était total, pour tout le monde, à commencer par la rousse qui ne savait comment réagir face à une attaque aussi frontale. Léontine n’était pas du genre à s’emporter et encore moins à se donner en spectacle. Le comportement de la blonde laissa les autres danseuses perplexes, mais elles acceptèrent sans trop broncher de quitter la pièce, laissant ainsi les deux anciennes compères en tête à tête.
— Ca ne te suffisait pas de mettre le groupe en danger ? Il a fallut que tu me mettent dans le pétrin ?! Persuadée d’avoir fini sous les barreaux à cause de la plus âgée, Léontine se sentait profondément trahie et déçue.
Sans laisser le temps à l’autre de parler, elle continua à cracher son venin, sans prendre la peine de vérifier qu’aucune oreille ne traînait.
— C’était quoi le but ? De me prouver que je pouvais aussi me faire arrêter ? Sans difficulté, la blonde se souvenait de leur dernière conversation à la guinguette du parvis, un moment lourd en émotion qui avait causé une bonne dizaine de nuit blanche. Lors de cet échange, la danseuse avait pointé du doigt la lâcheté de la blonde, au point de la voir comme une véritable traître.
— Tu peux me critiquer, me haïr… Mais m’envoyer en prison ?! Tu ne manques pas de toupet ! Il fallait être sacrément atteint pour agir de la sorte, surtout avec une ancienne amie. Certes, Léontine avait mis fin à leur amitié par peur d’avoir des ennuis, mais jamais elle n’aurait pu faire un truc pareil.
Son orgueil en avait pris un coup, tout autant que sa réputation. Parce que jusqu’ici, malgré son caractère difficile, tout Paris la voyait comme une enfant de bonne famille. Depuis, certaines personnes se mettaient à douter d’elle, et par extension douter des propriétaires des thermes. Mettre ses parents adoptifs dans une situation inconfortable lui déplaisait fortement, d’autant plus qu’elle n’était coupable de rien. Héloïse était allée trop loin pour se venger, et Léontine comptait bien le lui faire payer.
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