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Léopold Garnier-Brissac

Léopold Garnier-Brissac
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are we just cogs in a machine?    Lun 3 Aoû - 9:55

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Un verre d'éther, une bouillie de panais, une routine peu aguichante qui s'est installée depuis longtemps. A six heures, l'homme ouvre son atelier, met en route le feu qui alimente les presses en vapeur et sort son petit carnet dans lequel son travail de la journée est déjà planifié. Ca ne change pas beaucoup de la prison et il a du mal à se dire qu'il en est sorti il y a peine un an. Levé, promenade, travail, repas, couché, rebelote. Le tout-venant n'est pas plus libre de son temps que les taulards de la roquette, en vérité. Un sourire ironique s'esquisse timidement pour disparaître aussitôt - à quoi bon sourire quand il n'y a personne pour le voir ? A rien, exactement.

Le jour passe, les commandes s'enchaînent. Léopold à le pied sur la souffleuse de sa presse, les bras musclés par la manivelle qu'il tourne sans relâche pour gagner son pain. A vingt heures, notre imprimeur se perche sur le haut tabouret qui lui sert de salle de pause et entame une cigarette durement obtenue lors d'un pari d'animomates. Il en aspire chaque particule comme si c'était la dernière, ses yeux couleur lagon clos de béatitude.

La fumée de cigarette serpente dans l'atelier, caresse les lettres de métal parfaitement rangées sur l'établi qui servent à imprimer les textes de ses clients. Des résidus d'encre collés à ses doigts, à sa chemise d'un blanc sale, lui donnent l'air de s'être battu avec une pieuvre - ou avec un gratte-papier de l'impératrice. Sur les murs, les prototypes des affiches réalisées ces derniers mois lui renvoient l'amour qu'il leur porte, silencieusement. Presque comme un murmure. Le parquet grince, le smog s'infiltre sous les lattes et baigne la pièce d'un vague halo grisonnant lourd de sens. Il frappe à la fenêtre et exige que Léopold le fasse entrer. Après tout, c'est sa ville, ici. Tout lui appartient. L'imprimeur fait la sourde oreille, bien sûr, les lèvres vissées à ce bâtonnet de plaisir qui se consume bien trop vite. Le soleil - astre que les Parisiens n'ont plus vu de leurs propres yeux depuis une éternité - se couche paresseusement sur les faubourgs, incapable de percer les nuages mais donnant au smog cette mystérieuse rougeur qui rendrait nostalgique le plus stoïque des ingénieurs de l'ordre du Mercure.

Une ombre se dessine derrière la porte vitrée de l'atelier. Alors qu'elle s'apprête à entrer, Léopold se questionne. Est-il vraiment utile de continuer à vivre, à se tuer au travail, si c'est pour ne jamais voir le soleil ? Les petites gens ont-ils un espoir d'être un jour libérés ? Il n'est pas philosophe. Il n'est pas historien. Sa culture se résume à moins que rien, mais il ne peut s'empêcher de vouloir lutter, même si son âme en est harassée.

On est tous des rouages, insignifiants, dans la grande machine de l'état. N'est-ce pas ?
Louise Favager

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Activité : Psychiatre par vocation. Fortifier les fragilisés, les ébranlés ou les chancelants. Auditrice, collaboratrice ou assistante ; elle observe, écoute, examine, reformule. C’est sa fortune, son ouvrage : guider les émus, les inquiétés, les surexcités, les déchirés ou les ivres. Passionnée par l’engrenage des encéphales, elle cherche et spécule pour parvenir à concevoir ce qui chemine au cœur des ramifications nerveuses de chacun – car le smog, mes bons amis, n’est parfois pas dans le ciel.
En société : Eclairée pour certains, charlatan pour d’autres. Episodiquement ingénue ou au contraire tout à fait impassible. Louise est difficile à cerner, qui est-elle vraiment au fond ? Le sait-elle elle-même ? Respectée par ses clients et confrères, elle reste au demeurant discrète et en retrait. Il serait fâcheux de mettre en lumière ses propres problématiques.
Organisation(s) : Orme
Besace : Un carnet de note couvert d'une housse en cuir marron usé, si ouvert, rempli d'observations écrites en patte de mouche à l'encre noire. Le stylo utilisé est accroché par l’embout à la côte du carnet. Divers livres avec des annotations et des pliures à certaines pages, mais également quelques seringues et un flacon à peine entamé de pypthur…

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Re: are we just cogs in a machine?    Lun 3 Aoû - 20:06

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@léopold garnier-brissac

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Papiers en main, Louise marcha d’un pas vif en direction de l’imprimerie. Il faisait une chaleur étouffante bien que l’on n’y voyait toujours aucune once de lumière au travers du smog. Elle regrettait le temps jadis où sa mère affirmait que les ciels couverts n’étaient que passagers, où elle aurait pu prendre une grande inspiration sans rubéfier sa gorge. Son retour d’Alger avait été contraignant, passer des campagnes encore préservées à l’usine qu’était Paris, aux machines et à la toxicité de l’air ambiant était une sacrée besogne. Louise aurait sûrement pu relativiser si les inconvénients ne s’étaient présentés que sur ce plan-là, mais ce n’était pas le cas. Elle supportait très mal l’absence de thé, de lait, de viande, de fruits, de bonnes choses de manière générale, même les plus simples. « Les plats sont aussi fades que la vie à Paris.» songea-t-elle amèrement. Louise avait l’impression que chacun de ses sens s’était atrophié à son arrivée à la capitale : le goût des choses se faisait rare et on sentait leur odeur à ses risques et périls, l’on entendait à peine autre chose que la monotonie mécanique de Paris. L’on imaginait les couleurs du spectre visible, puisque l'on y voyait que le noir du smog ou le gris des bâtiments. Parfois, elle ne pouvait écarter ce sentiment d’imposture auquel elle faisait face lorsqu’elle écoutait les patients de l’Hôtel-Empire, comment les aider alors qu'elle même ne parvenait parfois pas à supporter l’état dans lequel le Vif Argent avait laissé la ville. Les perspectives d’avenir s’amenuisaient davantage chaque jour, mais il fallait vivre malgré tout.

Louise était toujours exposée aux doutes, aux questions existentielles et tout ce qui s’en rapproche – en tout cas elle faisait régulièrement face à celles des autres. Pour ce qui est de ses propres questions, elle se contentait de les garder bien tapies au fond d’elle, prétextant qu'il ne fallait pas flancher. Le mieux, pour ce faire, était de se concentrer sur le positif selon elle. Elle avait ouïe dire qu’un pissenlit avait éclos, c’était le début d’un renouveau auquel elle s’accrochait. Si Louise tenait, elle pourrait assister à ce renouveau, peut-être même y participer. Après tout qu’est-ce qu’un engin sans les composants internes qui le constituent ? Que serait la grande machinerie de l’Empire sans les rouages qui la font tourner ? Si l'Empire tendait à s'avancer chaque jour un peu plus vers un désastre, Louise pensa qu’il ne s’agissait là que d’une question de direction. Lorsque les rouages se mettraient à tourner dans le sens de la marche ; l’on ne pouvait qu’aspirer à un avenir radieux. Elle ébauchait un sourire satisfait à cette idée d'avenir radieux, alors qu'elle s'approchait maintenant de l'entrée de l'imprimerie. Louise poussa la porte entrouverte et remarqua les lettres soigneusement disposées sur l’établi, ainsi que les exemplaires de ce qui semblait être les prototypes d’affiches déjà réalisées. Ses yeux vert empire croisèrent le regard aquamarine de l’imprimeur accoudé à son tabouret, une cigarette entre les lèvres. Louise s’annonça, un sourire radieux laissant entrevoir ses dents et plus encore, ses espoirs.
« Bonsoir, je dérange ? »
Léopold Garnier-Brissac

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Re: are we just cogs in a machine?    Mar 4 Aoû - 15:54

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« Bonsoir, je dérange ? »

Le regard de Léopold croise celui de la jeune femme qui vient de poser le pied dans son antre. Plus que ses yeux, pourtant, c'est son sourire qui l'alpague. Il est frais, plein d'un espoir qui semble presque naïf de ce côté-ci de Paris, et surtout, sincère. Il n'en a pas l'habitude, l'imprimeur, et est généralement le seul à montrer ses gencives à qui mieux mieux dans le quartier. Inconsciemment, il mimique donc la nouvelle venue et lui rend sa risette au centuple.

« Bonsoir ma p'tite dame ! » Il saute de son tabouret, la cigarette toujours au coin des lèvres, et lui fait signe d'entrer. « Non, non, tu penses ! Entre donc. »

Commerçant mais pas vraiment spécialiste des ronds de jambe, il tutoie tout le monde. Son œil analyse l’ingénue qui, elle, passe son atelier au crible. Elle n’a pas l’allure des faubourgs mais plutôt l’air de quelqu’un de très affairé qui a plutôt réussi dans la vie. Sa fatigue est palpable mais elle n’empeste pas la misère comme celle des ouvriers d’usine ou des marchands de quartier. Tout ceci aiguise la curiosité de l’imprimeur qui, après avoir de nouveau tiré sur sa cigarette dont les cendres s’envolent à travers la pièce, enchaîne promptement.

« Alors, en quoi j’peux t’aider ? Un bouquin à faire tirer ? » Elle a l’air du genre à lire ou à écrire des livres. « Un dessin à faire graver, peut-être ? » Léopold est un habitué des artistes et des grattes-papier, on lui demande souvent de reproduire des dessins pour les imprimer ou d’illustrer des articles de presse. Ça aussi, c’est la routine. Histoire de faire plus pro il époussète ses mains pleines d’encre sur son pantalon en velours côtelé et invite la jeune femme à prendre un siège à côté de l’établi contre lequel il s’accole.

Les femmes c’est pas son truc, il ne sait jamais trop comment se comporter avec ; et comme la délicatesse n’est pas non plus sa tasse de thé, il est bien infoutu de savoir si son accueil est correct ou pas. Son sourire est toujours présent, cependant.
Louise Favager

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Re: are we just cogs in a machine?    Mer 5 Aoû - 23:57

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@léopold garnier-brissac

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L’homme à l’allure fine lui rendit son sourire, Louise s’en réjouissait puisqu’il ne s’agissait pas d’une coutume d’ordinaire très répandue ici à Paris. Bien que pour la jeune femme, il s’agissait d’un geste tout naturel. La cibiche toujours en bouche, il l’invita chaleureusement à entrer. Son tutoiement enchanta Louise habituée aux formules bien plus formelles et non pour le moins glaciales de l’Hôtel-Empire. Ainsi, elle trouvait cet accueil charmant.

« Alors, en quoi j’peux t’aider ? Un bouquin à faire tirer ? »

Louise sentit bien que comme avec le peu de personnes qu’elle avait pu rencontrer dans les faubourgs, elle semblait apparaître comme une personne d’un autre monde. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui faisaient qu'elle persistait à vouloir participer activement à l’amélioration du bien-être des gens de petites classes, que l’Empire délaissait et négligeait depuis bien trop de temps maintenant.  Elle n’était pas de ceux qui jugeaient ou consignaient les individus dans des cases, elle se plaisait davantage à les accepter tels quels.

« Un dessin à faire graver, peut-être ? »

Si Louise n’avait pas réussi dans la médecine, elle se serait probablement rapprochée du dessin. Celui-ci avait d’ailleurs une place importante dans sa pratique, notamment avec les patients n’étant pas en mesure de pouvoir verbaliser. Il s’agissait là d’un excellent moyen d’expression, c’est pour cela d'ailleurs qu’elle s’était permise – avec ses modestes capacités en la matière – d’esquisser les silhouettes d’une consultation sur sa réclame.

« Eh bien ni l’un, ni l’autre ! Bien que cela se rapproche de la seconde option ! »


Louise ne put s’empêcher de remarquer l’imprimeur balayer ses paumes sur son pantalon, elle espérait vraiment ne pas le déranger – pire encore, le mettre mal à l’aise. Toujours dans la crainte de déranger les personnes qu’elle sollicitait, Louise était timide. Son métier requérant qu’elle soit très attentive à la gestuelle et au non-verbal, l’amenait à remarquer et interpréter plus ou moins bien ce type de geste. Elle abordait chacune des personnes à qui elle s’adressait avec la plus grande des retenues depuis que ses parents l’avaient envoyé chez son oncle. Comme si elle avait été de trop, comme si elle avait été une charge de plus. Cela lui avait laissé le sentiment amer d’être une intruse, même dans les circonstances les plus bénignes. Louise remarqua que l’imprimeur souriait encore en l’occurrence, de quoi rassurer la jeune femme qui lui tendit délicatement son prospectus, laissant paraître ses ongles rongés.  

«Je viens pour faire des copies de cette affiche, est-ce possible ? »


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Re: are we just cogs in a machine?    Ven 7 Aoû - 18:42


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La petite jeune semble définitivement appartenir à un autre monde, mais Léopold remarque cependant que son attitude se fait plus timide qu’impérieuse – chose plutôt rare quand le gratin se rend dans les faubourgs. Ces gens-là ont souvent tendance à regarder ce qui les entoure comme un châtelain regarderait une porcherie sur son domaine : ça lui appartient mais il rechigne pourtant à y mettre les pieds.

« Eh bien ni l’un, ni l’autre ! Bien que cela se rapproche de la seconde option ! »

L’imprimeur lève un sourcil, agréablement surpris. Par son ton, d’abord, qui est contre toute attente on ne peut plus avenant, mais également par la manière dont elle réfute ses deux propositions tout en piquant sa curiosité. L’homme est d’un naturel affable et affectionne les personnes qui le sont tout autant. Il tire sur son presque mégot avec un large sourire, sans piper mot. Epousseter ses mains sur son pantalon était une très mauvaise idée, par ailleurs, et des traces de doigts parsèment maintenant son froc en divers endroits.

« Allons bon, je ne me trompe pas souvent ! »

Son regard croise celui de la jeune femme et il remarque qu’elle semble soudain repliée sur elle-même – comme si elle avait peur de déranger. Léopold n’est pas un expert en parlotte mais avait appris en prison à prendre en compte la gestuelle de ses co-détenus ; question de survie. La petite lui tend alors un prospectus visiblement réalisé à la main. Les ongles rongés trahissent cette anxiété qui semble émaner de sa cliente.

« Je viens pour faire des copies de cette affiche, est-ce possible ? »

Léopold se saisi du prospectus avec le peu de délicatesse qu’on lui connait, malgré l’effort colossal qu’il fait pour ne pas paraître trop brusque. D’un œil critique, il inspecte le document.

« Voyons-voir ça… » il exhale par les narines la fumée grisâtre de sa cibiche. Levant un sourcil, il verbalise la première chose qui lui vient à l’esprit. « T’es psychologue, minette ? »

Son accent du sud de la France est rieur, incrédule. Léopold n’a pas l’habitude d’avoir ce genre de personne dans son atelier, c’est rien de le dire. Il scrute à nouveau la jeune femme avec intérêt.

« Ne le prend pas mal, hein, c’est juste que t’as l’air fichtrement jeune pour être une tricoteuse de méninges ! »

Le terme n’est sûrement pas le bon mais l’imprimeur s’en fout - sa diarrhée verbale le perdra, un de ces quatre. Il en oublie même le prospectus qu'il tient toujours entre ses doigts encrés.
Louise Favager

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Re: are we just cogs in a machine?    Dim 9 Aoû - 20:15

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@léopold garnier-brissac

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L’imprimeur semblait quelque peu s’étonner de la requête de Louise et s’intéressa autrement à la cadette. Celle-ci ne put s’empêcher de remarquer l’accent tonique de son interlocuteur, non sans lui rappeler les contrées où elle avait grandi. Il était bien rare de trouver une telle mélodie dans l’océan d’accents nasaux des Parisiens. En arrivant à Paris, Louise prit très vite l’initiative de bannir les expressions qu’elle avait l’habitude d’utiliser en raison du fait qu’elles l’auraient probablement discrédité dans la sphère professionnelle. Entendre un tel accent réchauffa son cœur et la jeune femme commença petit à petit à se détendre. Le pressier examina l’affiche que celle-ci lui avait tendu et commença à lui poser des questions sur sa profession.

« T’es psychologue, minette ? »

Le franc parler de l’imprimeur bouscula les habitudes de la jeune femme de nouveau, décidément cet imprimeur était plein de surprise. L’exclusion du cadre formelle rassurait Louise, ici elle n’avait pas besoin de prendre de pincettes ou de jouer le rôle qu’on attendait d’elle. L’imprimeur ayant une quinzaine d’année de plus qu’elle, lui fit plus ou moins maladroitement remarquer sa jeunesse. Son sourire s’effaça doucement, sa jeunesse lui semblait si loin. Elle n’avait que vingt-six ans, mais elle avait très tôt pris conscience de la cruauté du monde. Elle raisonnait comme les personnes de dix ans de plus qu’elle, sans pourtant avoir acquis les connaissances qui les poussaient à raisonner comme tel. Mi prématurée, mi immature, Louise ne savait pas vraiment si elle pouvait se considérer comme jeune. Elle ne s’en souciait pas vraiment finalement, elle tâchait de se considérer comme vivante et c’était déjà pas mal. Elle reprit ses esprits et rebondit tout sourire sur les mots de l’imprimeur, comme si de rien n’était.

« Effectivement, je suis toubib »


La jeune fille se dérida un instant, presque honteuse d’avoir si vite ôté les barrières qu’elle s’était si longtemps forcée à mettre entre elle et les autres. Et comme pour se justifier de cet écart, elle ajouta en souriant.

« En voilà un accent jouasse, vous n’êtes donc pas de Paris vous non plus ? »

Elle aurait bien voulu connaître son nom dans un premier temps. L’occasion ne s’étant pas encore présentée et Louise ne voulant pas précipiter la tournure de la conversation, elle se contenta de s’accrocher à l’accent de son interlocuteur pour en savoir davantage sur son identité. C’est ce qu’elle appliquait dans son travail où parfois de simples tournures de phrases s’avéraient être plus révélatrices sur l’identité de l’individu que toutes les conversations recueillies aux cours des consultations antérieures.  

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Re: are we just cogs in a machine?    Jeu 13 Aoû - 22:51


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La petite semble osciller entre timidité et soulagement. Elle s'évade, comme du vif argent que l'on tenterait de retenir entre ses doigts. Son sourire aussi, d'ailleurs, à la mention de sa jeunesse. Léopold n'arrive pas à savoir s'il a fait une bourde ou pas, il se caresse la nuque d'embarras.

« Effectivement, je suis toubib. »

Une risette s'installe sur le visage de l'imprimeur. Il s'exclame « Bon dieu gamine, j'savais même pas que c'était d'la médecine !». Pour lui, les psychologues ne sont que des charlatans, des illuminés, ou des scientifiques voulant faire des expériences sur les êtres humains, mais certainement pas des médecins - et d'ailleurs il n'en a jamais rencontré en vrai, donc ça lui parait foutrement abstrait. Mine de rien, savoir que la demoiselle est toubib lui fait prendre conscience qu'il n'est clairement pas présentable. Ses yeux passent, perplexes, de l'affiche à ses frusques maculées d'encre. Il n'a cependant pas le temps de poursuivre sa réflexion car la jeune femme enchaîne alors :

« En voilà un accent jouasse, vous n’êtes donc pas de Paris vous non plus ? »

Léopold reporte son attention sur sa cliente, tout sourire.

« Ahhh, bien vu l'aveugle. Toi "non plus", hein ? T'es d'où, donc ?» il tire sur sa cigarette qui rétrécit à vu d'oeil. « Faut se serrer les coudes, entre non-Parisiens ! »

Léopold vit à Paris depuis presque vingt ans, mais quand même. Il n'est pas parisien et ne le sera jamais, croix de bois, croix de fer. Il pose l'affiche de sa cliente et lui tend la main pour la lui serrer. Les "provinciaux" se reconnaissent entre eux, ils s'entraident pour ne pas se faire bouffer par les vermines de la capitale. « C'est quoi ton p'tit nom, d'ailleurs ?» Tout en joie de rencontrer une autre exilée, l'imprimeur décide qu'il est temps de se présenter dans les règles de l'art - nommément une bonne poignée de main et une bouteille de vodka qu'il sort d'un placard à côté de son établi.[/color]
Louise Favager

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Re: are we just cogs in a machine?    Mar 18 Aoû - 23:24

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@léopold garnier-brissac

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Louise tenta tant bien que mal de ne pas – pour une fois – faire cas des moindres faits et gestes de son interlocuteur. Cette manie faisait partie intégrante des nombreuses obsessions qui s’étaient développées après qu’elle eut été victime de son oncle. Elle se disait que viendrait un moment où il faudrait qu’elle apprenne à les gérer, de sorte qu'elle puisse vivre avec sans courir le risque que celles-ci ne lui portent préjudice. Après ce qui semblait s'apparenter à de la confusion selon notre observatrice chevronnée, l’imprimeur s’étonnait que le métier de psychologue fasse partie intégrante des professions du domaine médical. En même temps, comment Louise pouvait-elle lui en vouloir ! La psychologie était une matière encore naissante et elle pouvait comprendre que l’exploration de l’esprit humain effrayait ou paraissait discutable pour ceux qui ne s’étaient pas davantage penché sur le sujet. Louise décelait néanmoins une certaine curiosité de la part de l’imprimeur quant à sa profession et elle répondit alors d’un ton didactique à l’intéressé.

« Il faut un début à tout ! »

La jeune psychiatre faisait souvent face aux amalgames et aux conventions qui gravitaient autour de son métier. Il lui était parfois arrivé que certains patients l’accusent ouvertement de charlatanisme ou d’affabulation, bien que la plupart de ces détracteurs n’eurent été en fait des patients soit un peu trop fiers, soit un peu trop dans le déni. Le retour sur soi était quelque chose d’assez difficile à concevoir pour beaucoup de gens, et lorsqu’on n’accusait pas la profession de toutes les façons on se contentait simplement de clore le suivi. Ainsi lorsque l’occasion se présenterait, Louise se verrait ravie de lutter contre ces préjugés persistants à l’égard de sa carrière en inculquant bien volontiers les principales valeurs qui lui sont relatives à l’imprimeur. Celui-ci rebondissait d’ailleurs sur son invitation à faire connaissance, sans qu’il lui réponde pour autant. Il avait l’air d’un homme qui ne se livrait pas facilement malgré ses airs chaleureux et avenants. Sous ses allures hospitalières, Louise sentait bien que l’imprimeur resterait sur la défensive si elle ne s’ouvrait pas un peu plus à lui. Elle avait instauré malgré elle cette atmosphère dense où les deux individus se toisaient jusqu’à connaître l’autre. Il s’agissait néanmoins d’une perche qu’il lui tendait et que la jeune femme devait saisir dès à présent. Elle commença par finalement par le tutoyer à son tour, bien que le changement de registre lui paraîtrait sûrement quelque peu soudain.

« J’ai grandi dans un village du Puy-de-Dôme, à une petite demi-heure de marche du Lac Chambon. C’était la campagne, pas comme ici ! C’est d’ailleurs pour mes études que je suis venue m’installer au sein de la capitale, pas par plaisir tu t’en doutes bien ! »



Il n’y avait pas que les études évidemment. La campagne avait des avantages comme des inconvénients, les manières dans les villages ne sont pas les mêmes que dans les grandes villes. Il y a moins de monde et cela laisse libre court à des vices sans nom. Certains hommes de ces contrées, pour la plus part très peu éduqués ne respectent pas réellement les principes fondamentaux tels que ceux du savoir-vivre et du consentement. Lorsque Louise avait voulu travailler, elle avait du faire face à un certain nombre de propositions déplacées ou tendancieuses et ce malgré le fait qu'elle n’eût qu’une dizaine d’années à l’époque. Evidemment, pas de témoins, personne n’en parlait bien qu’il s’agissait de quelque chose de courant. Evidemment pas de prévention, seulement le dégoût et le retrait. S'éloigner de la campagne, c’était aussi fuir ce monde-là avec la volonté d’un jour détenir l’aptitude nécessaire pour l’améliorer. Cela ne faisait pourtant pas de la jeune femme une citadine, elle gardait en son cœur les vallées de sa plus tendre jeunesse, le goût des fruits, l’odeur des thés. Un luxe que n’offrait pas la capitale, au même titre que les conduites aimables des bonnes gens au train de vie philosophe et établi. Elle ne pouvait donc qu’acquiescer avec joie lorsque l’imprimeur mentionna la perspective d’une entraide entre provinciaux.
Lorsqu’elle hocha la tête en signe d’accord, elle vit l’homme troquer l’affiche pour laquelle Louise était venue contre une poignée de main. La jeune femme lui tendit la sienne alors qu’il lui demandait son nom.

« Louise, et toi ? »


Elle le vit sortir une bouteille de vodka de son établi – une denrée rare à Paris – qu’il devait sûrement cacher pour ses propres usages, à l’instar de la gentiane qu’elle gardait consciencieusement dans le fond de ses placards pour pallier au manque de médications destinées aux accès pathologiques. Elle ne le jugea pas, les stratégies de coping sont propres à chacun. Il avait sûrement lui aussi des démons à combattre, qui n’en avait pas ?
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