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 beatus vir

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beatus vir    Mer 22 Juil - 22:51

Quel était son nom ?

On ne savait pas vraiment, et, à dire vrai, personne ne voulait rien savoir de cette putain sortie du bordel parisien.

Aux classes inférieures, il n'existe pas d'obsèques. Au mieux, vos proches viennent contempler votre salut, larmoyants sous les étoffes sombres, avant de jeter la poignée de terre qui vous accompagnera dans l'au-delà.
Au pire, vous êtes seul, et vous mourrez seul.

De tombe, il n'y a pas réellement. Banale croix anonyme plantée au sol comme le cure-dent dans son caviar, un cercueil fait du bois bas de gamme comme on en trouve partout à l'entrée du cimetière. Vous êtes mort, et c'est à vos proches vivants qu'il revient de prendre soin de votre dépouille.
Sauf si, de proches vivants, vous n'avez guère.
Sauf si vous n'avez aucun nom, aucune notoriété, aucun sou. Et vous aurez tout juste le droit de vous décomposer dans une boîte étroite percée du couvercle où la pourriture rampante viendra finir le travail.

Une cérémonie d'enterrement sans aucun visiteur n'a rien d'étrange quand il s'agit d'inhumer une personne des bas-fonds. Ce qui est surprenant, en revanche, c'est bien de constater qu'une silhouette étrangère est tout de même venue assister à ce spectacle muet mené par un Léonce Camus dont l'indifférence dans la tâche ne pourrait en rien laisser supposer que ce qui fut un corps bien vivant autrefois se trouve désormais sous cet amoncellement de terreau.

Il jette les dernières pelletées et bientôt on n'entend plus du tout la terre frapper la caisse de bois dissimulée sous les gerbes, ce puits noir qui se referme sur lui-même comme la bouche des enfers. Vêtu de son long manteau ébène qui lui confère cette allure funèbre, Léonce achève son devoir dans un silence religieux. Peu lui importe que cet homme, seul invité de ces funérailles solitaires, se tienne toujours debout ici alors que pourtant il n'y a plus personne à saluer.
Mais le fossoyeur se demande.
Il se demande bien quel drôle de personnage irait à l'enterrement d'une fille de joie des bas quartiers.
Solal Rousseau

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Re: beatus vir    Ven 24 Juil - 9:22

HURT
Pas de nom, à peine un visage.
Recouvert par la suie, le terreau, le fumier.
Elle a fini comme elle a commencé.
Oubliée de tous.
La croix vierge.
D’un corps pourtant vivace auprès des mâles.
Elle n’était rien pour moi.
La mère de substitution que j’aurais préféré ne pas connaître.
J’ai été son fils une paire d’années insolubles.
Un fils qu’elle a relégué au second plan.
Parmi tous ses autres plans.
Je ne l’ai pas revue depuis longtemps.
Et la voilà sous terre.
Gisante, dans un sol consacré.
Personne n’est venu.
Un seul parvenu.
Celui qui n’a pas compté.
Je ne l’estimais pas.
Je ne pensais même pas venir à la cérémonie funèbre.
Résidu de la société.
Parasite ambulant.
Elle ne mérite même pas ce sort.
Pas de larmes.
Elles se sont taries.
Je n’ai pas mis l’argent dans une pierre tombale digne de ce nom.
Juste ce lopin.
Marqué d’un X.
Pas pour un trésor.
Pas de prière pour elle.
Aucune gerbe de fleurs, même fanées.
Le vent grésille dans mes oreilles.
Je reste un long moment debout.
Figé dans le temps.
Ressassant quelques réminiscences.
L’homme en noir a fini sa tâche.
Il est soigneux, respectueux.
Aussi silencieux que le lieu qu’il entretient.
- J…Je vous remercie, monsieur.
De s’occuper de ma mère mieux que je ne l’ai jamais fait.
C'est son devoir, mais il l'accomplit avec déférence.
J'apprécie le travail bien fait.
Je lui tends quelques pièces.
Je lui dois bien une récompense.
Métier pénible, selon les dires.
Noble labeur dans mon esprit.
- Ce…ce n’était même pas ma vraie mère…à dire vrai...
L’heure n’est pas aux regrets.
J’aurais dû soigner la relation toxique qu’elle avait créée ?
Certes non.
Rien ne m’y obligeait.
Voilà que je me confie à l’inconnu.
- Il vous est déjà arrivé de…d’enterrer l’un des vôtres ?
Cela doit être terrible non ?


Dernière édition par Solal Rousseau le Ven 24 Juil - 23:32, édité 1 fois
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Re: beatus vir    Ven 24 Juil - 22:45

Spoiler:

Le dernier coup de pelle planté, fossoyeur prêt à passer au prochain défunt.
Et cependant, c'est la première fois qu'un endeuillé lui confie des sous pour avoir balancé le humus sur un cadavre. Que faire face à cela ? Le cuivre roule froidement dans sa paume. Aucun commentaire sur ce pourboire, c'est surprenant mais si on lui a donné, alors c'est qu'il devait le recevoir. Quand bien même Gustave ne lui ait jamais parlé de ça après la cérémonie.

Ce n'était même pas ma vraie mère.

Enfant de putain ? Mais pas vraiment on dirait. Que c'est étrange.
Léonce pose les yeux sur cet interlocuteur à qui il ne répond pas. C'est l'interrogation qui vient après qui détonne, porte Camus à une introspection brève.

L'ombre du smog recouvre le cimetière.

- Il y a longtemps. Je les ai mis ensemble.

Il pense à eux et au caveau qui les garde tous les deux.
Puis ses doigts longs et osseux s'ouvrent à cet étranger.

- Cet argent, pourquoi ne pas l'avoir donné pour une meilleure tombe.
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Re: beatus vir    Ven 24 Juil - 23:58

L’homme vêtu d’ombres ne semble pas comprendre ce geste.
L’argent pour enterrer.
Pour offrir un dernier havre de paix aux morts.
Un réflexe d’outre-tombe que je m’apprête à retirer aussitôt.
Mais mon interlocuteur mutique finit par accepter le présent.
Honnêtement, je n’ai pas réfléchi, pas suffisamment.
Cela aurait pu être mal interprété.
Je baisse les yeux, la mine contrariée.
Les mains entortillées comme je le fais souvent.
Trop souvent à mon goût.
Espèce de démangeaison malsaine.
Je n’aurais pas dû ?
J’espère ne pas l’avoir offensé.
Je pensais que c’était dans les mœurs.
Je n’ai jamais eu à assister au crépuscule d’un être.
Jamais eu à fermer les paupières de cire.
Contraste de vie et de stupéfaction mortuaire.
Un pourboire pour soulager un fardeau que j’effleure de la pensée seulement.
Je m’interroge encore tandis que le personnage sinistre réplique.
Lui aussi a connu ça.
- La mort vous fascine tant que vous avez voulu en faire votre métier ?
Sourcil qui se lève.
Curiosité que je devrais restreindre parfois…
Il me prend ensuite au dépourvu.
Une meilleure tombe…pour une meilleure mère ?
- Elle n’en…va…valait pas la peine.
Parfumeuse croqueuse d’hommes.
Elle m’a recueilli pour…pour mieux m’abandonner.

Le mépris, l’amertume, tout est dans les mots.
Je crache mon venin, malgré la tombe fraîchement achevée.
Aucun respect pour elle.
Revenons au sieur face à moi.
J’apprécie sa compagnie discrète et pudique.
J’aimerais en savoir plus.
- Vos parents…vous ne leur en voulez pas d’être partis ?
Des questions se bousculent, je reste prudent.
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Re: beatus vir    Sam 25 Juil - 12:06

- Elle est familière.

Plus qu'elle ne pourrait le fasciner. Il serait bien triste qu'une passion se traduise en volées de terre sur le bois. La mort est... elle n'est pas si froide qu'on pourrait le penser. Elle a quelque chose de rassurant, et quelque chose qui relève de l'ordre de l'obligation. C'est le protocole, dit-on. Aussi Léonce Camus s'applique dans cette tâche, même lorsqu'il s'agit d'une sépulture sans ornements et sans témoins. Rien qu'un homme et ses curieuses questions.

Le cuivre s'endort au fond d'une poche de manteau.
Puis l'homme en question lui raconte quel genre de mère était la sienne.
Suivi d'une autre interrogation.

- Je devrais ?

On naît tous de la terre, il est donc normal d'y retourner. Mère nature, ou du moins ce qu'il en reste, nous offre la vie à un moment imprécis de l'existence ; c'est dans l'ordre des choses de lui rendre ce don un jour ou l'autre.

- Tôt ils m'ont appris que ces linceuls ne distinguaient ni les couleurs ni les richesses.

C'est une forme de justice aveugle. On ne peut pas en vouloir d'un jour s'abandonner à elle.

- La mort, ça vous fait peur ?
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Re: beatus vir    Lun 27 Juil - 13:25

Comment choisit-on de devenir le sbire de la faucheuse ?
Prince du trépas.
Le regard dur et froid comme le marbre des tombes alentour.
La mort m’est aussi familière.
Je la frôle, je l’offre, la commets.
Sans mesure.
Quelques gorges nouées d’un foulard en soie.
Quelques joues griffonnées de fer.
Et le flot sanguin qui s’écoule a l’aspect du rideau d’un théâtre.
Gondolé, secret, épais.
Dans une tragique dimension.
Je dois admettre que cet homme de la terre m’intrigue.
Je lui voue une admiration sincère.
Mais peut-être que je l’embête avec mes questions.
Il doit avoir des affaires à régler.
Six pieds là-dessous.
Il me répond laconiquement.
C’est que je ne dois pas tant le lasser.
- Je n’en veux pas à cette femme d’être partie.
El…Elle ne m’a pas laissé un souvenir impérissable.
C…Comme vous avez p…pu le constater.
On ne peut pas…blâmer ces départs aléatoires.
Juste soi-même…
Si on a quelque regret dans le cœur.

Me revoilà poète maudit, les mots en ébullition.
Plume qui s’agite sur le parchemin.
Mes envolées lyriques me reprennent, frénétiquement.
- J’ai seulement peur…qu’elle n’emporte…ce que j’aime le plus au monde.
Mes amours.
Mes obsessions.
Ces flammes dans mes reins, cette ardeur pulmonaire, intrinsèque.
Jusque dans les tripes.
Tous ces magnifiques êtres que j’aime et qui ne m’aiment pas en retour.
- Quant à moi, je…je sais que si elle m’emporte…
Je ne manquerai pas à grand monde.
On ne se soucie guère de…de mon sort.
Et vous ?
J’imagine que travailler av…avec la Mort vous fait la craindre moins…
Comme une banale amie, une collègue invisible…

Maintenant, je devrais le laisser.
Ma philosophie de comptoir est indigne de ce sieur.
Mais mes pieds ne veulent toujours pas bouger.
Alors je demeure.
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Re: beatus vir    Mar 28 Juil - 22:26

En fait, on ne choisit pas.
On naît avec ça dans le sang.

Léonce écoute ces mots qui lui sont versés, ces mots qui butent sans cesse à la lisière des lèvres de cet homme comme s'ils étaient étreints de trouille, de pudeur ou de retenue, qu'est-ce qu'il en sait.

- Et pourtant vous êtes venu à son enterrement.

Point de reproche dans sa voix : c'est un constat. Souvenir périssable mais souvenir qu'on est quand même allé voir une dernière fois. Des visiteurs qui se rendent au Père-Lachaise avec ça sur le visage c'est vrai Léonce n'en a pas croisés beaucoup. Vous êtes des raretés mais d'où venez-vous donc.

- Vous avez des regrets.

Au ton de sa voix on ne sait pas dire s'il s'agit d'une phrase qui attend une réponse. Seuls ceux au fort désir de se livrer y verront une opportunité de s'épancher.

À mesure que le fil de la conversation se déroule, le smog semble les avaler de plus en plus.

- Je ne sais pas, oui. À moi aussi ça arrivera. Peut-être demain. Et quelqu'un d'autre prendra ma place.

On dirait qu'il fouille à travers ses poches de manteau, longue cape noire qui a l'air de peser dix tonnes sur les épaules.

- De dehors, je connais pas grand-chose. Une amie m'a montré. Je n'ai pas vu le soleil cependant.

C'est une cigarette qu'il porte à ses lèvres.

- Vous, oui ? Enfant, je touillais le ciel du bout du doigt après ce point blanc.

Un briquet, maintenant.

- Mais jamais c'est sorti du brouillard.
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Re: beatus vir    Mer 29 Juil - 11:06

Qu’elle repose sur un lit mortuaire ou un lit de roses entourée de ses amants.
Cela m’importe peu.
Cette femme faisant office de mère n’a jamais été capable d’aimer, de chérir l’enfant que j’étais.
Pourquoi lui rendrais-je hommage aujourd’hui ?
Pourquoi me pousser à regretter, à culpabiliser ?
De quoi au juste ?
De l’avoir laissée dans sa fange ?
De l’avoir regardée avec mépris ?
- Aucun regret.
Si…si je…suis venu.
C’est pour vérifier qu’elle…qu’elle était bien morte.
Je…vou…voulais la fouler du pied.
La voir disparaître.
Je voulais…qu’elle meure.

Peut-être par ma propre main.
Ce n’est pas de la tristesse.
Mais l’instinct du chasseur.
Qui n’a jamais occis sa proie.
Comme un aveu de toutes mes fautes.
Fils meurtrier.
Elle a fabriqué un monstre à la manière de Frankenstein.
Ce même monstre qui cherche désespérément la lumière dans les limbes.
Les gens regrettent à foison, moi je me nourris de la mort.
Je veux la voir en face et lui cracher dessus.
Je devrais avoir quelques soupçons de piété dans ces circonstances.
Celui qui me fait face n’a jamais dû rencontrer des êtres aussi peu prompts à se repentir.
- Je suis un...mauvais fils, n'est-ce pas ?
Le jugement d'autrui est toujours aussi effilé que le fil d'un rasoir.
Je l’écoute, plus loquace qu’à l’accoutumée dirait-on.
Le brouillard m’étourdit.
On ne se distingue presque plus.
Je ne vois qu’une flamme d’espoir.
L’étincelle solennelle.
Je ne comprends pas les phrases alambiquées.
Les symboliques absconses.
J’ai l’impression que les racines des arbres s’attachent à mes chevilles.
- Ma quête est vaine.
Le bout du couloir…
Je ne l’ai jamais vu non plus.
Je creuse toujours.
Je creuse avec mes ongles.
Les nuits trop longues.
J’ai des manques, des frustrations.
L’autre s’est vêtu de fumée.
Et l’obscurité cannibale m’englobe.
- Si…un jour…vous avez une missive importante.
Je suis…facteur.
Je vous rendrai ce service.
Soyez-en sûr.

Je change d’état d’âme.
Moi aussi je veux me sentir utile.
- J’espère ne pas avoir…volé votre temps.
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Re: beatus vir    Mer 29 Juil - 12:55

Vérifier qu'elle est bien morte ?

- Soyez tranquille. À moins que la tombe soit vide, la mort ne fait pas demi-tour.

Un épais nuage blanc s'ajoute à celui du smog.
Le fossoyeur tend un de ces cylindres à tabac à son interlocuteur.

- Mon rôle c'est pas de juger.

Lentement Léonce quitte les bords de la sépulture pour rejoindre le sentier pavé. Sous la proposition qui lui est faite, il semble réfléchir un court instant.

- Je ne sais pas très bien faire ça, écrire.

À l'école on lui a appris comment tracer les lignes, mais c'est tout. Il y en a qui ont la prose, d'autres pas. Et bien qu'il décèle une forme de poésie dans les paroles de son homologue, Léonce n'a pas grand-chose de plus qu'il pourrait ajouter par écrit. Ses silences sont déjà assez évocateurs, entre deux couches de mystère.

- Mais c'est bon à savoir. J'ai tout mon temps aujourd'hui.

C'est la journée où l'on enterre les morts en famille vous savez ?

- Peut-être assez pour me mettre à la prose, qui sait.

Vieille plaisanterie ou réelle pensée, personne ne peut dire. Derrière ce visage qui ne sourit pas, Léonce y terre monticule d'idées. Un peu comme vous monsieur, qui avez votre mère en horreur.
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Re: beatus vir    Jeu 30 Juil - 16:27

Mes mots sont des cartes nébuleuses.
Cheminement incertain dans mon crâne.
Univers avarié.
Moi et mes lubies.
Des mappemondes d’antiquaire.
Des planisphères cornés.
Toujours devant moi, de fer et de glas.
Si je n’étais moi-même pas si glauque, j’aurais des frissons dans le dos.
Le voir ainsi, étreint par les abysses d’une âme sans doute torturée.
Bien que stoïque.
Il est aussi indéchiffrable qu’un vieux grimoire.
Vautour aux ailes cendrées.
Qui s’abat sur moi.
Quelques plumes calcinées.
Je me jette sur l’occasion.
Je n’attendais peut-être que cela.
J’épanche vos émotions sur le papier.
Jet d’encre et de mystère.
- On pourrait…s’installer d…dans un café.
Je peux…v…vous apprendre, monsieur.
A qui voudriez-vous…écrire ?

J’ai déjà oublié maman.
J’ai massacré les souvenirs.
Je les ai laissés sur les rivages du Styx.
Charon s’éloigne avec ses pièces qui cognent et sonnent.
J’emprunte le chemin de la sortie du cimetière.
J’ai la gorge asséchée.
Proposition insolite.
Je ne sais pas vraiment ce qui me prend de vouloir passer cette funeste journée avec ce gaillard.
Ce prince des oubliés.
De la terre mère.
Des passés consumés.
On pourrait aussi bien inventer nos oraisons funèbres.
Je me demande ce qu’on pourrait dire sur lui, sur moi.
Ne serai-je que le facteur sans nom amoureux de ses amis épistolaires ?
Un établissement de charme nous tend les bras.
J’entends bien sûr le genre de gargote parisienne.
Fumée d’albâtre, tasses fumantes et corsées.
Environnement chaleureux avec son mobilier en bois.
Sobre, sans prétention.
Un endroit parfait pour deux infortunés tels que nous.
- C’est ma…t…tournée.
Que voulez-vous boire ?

La compagnie me manque cruellement.
Alors je me montre aimable à l’envi.
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Re: beatus vir    Ven 31 Juil - 15:33

S'installer dans un café, vous apprendre, à qui voudriez-vous écrire.

Ce florilège complet lui échappe, le secoue du dedans, tellement qu'il faut bien rester de marbre physiquement pour que rien ne déborde. Inviter l'inconnu qui a enterré votre mère à boire un verre.

Ça n'était pas sérieux, vous savez. Je disais ça comme ça. Moi, écrire ?

Il se tait, range sa proposition de tabac dans le gouffre de ses poches.
Une plume à la place de la pelle. Une enveloppe au lieu du cercueil. L'odeur du café pour remplacer celle de la terre. Fossoyeur reconverti en écrivain ça sonne comme quelque chose d'impossible mais un peu intriguant. Une fantaisie qui donnerait presque envie de se laisser aller à la fée verte.

- Peut-être à mon amie.

Un cumulus s'échappe d'entre ses lèvres, monte aux cieux et contribue à cet écran de fumée.

- J'ai goûté le cidre, une fois.

Une rareté à trouver.

- Et j'ai bien aimé.

Midi approche. Il le sait, c'est dans sa poche, la trotteuse qui court, fuit les chiffres, effectue un tour complet, recommence. Le clocher ne résonne plus, mais l'habitude fait savoir le temps qu'il fait, même sous ces strates de smog.

- Dites, c'est quoi, votre nom ?
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Re: beatus vir    Mar 11 Aoû - 12:01

Comme deux épaves échouées sur un rivage.
Nous voilà autour d’un cidre.
Couleur soleil d’automne.
Breuvage d’ambre solitaire.
Pour deux âmes au cœur cadenassé.
Je l’ai imité.
Boisson douce et pétillante au palais.
Plaisir chantant.
Le moment propice à l’imagination.
Ce « peut-être » résonne comme un espoir insolite.
Fourberie indéchiffrable dans mon regard qui se pose sur les mains du fossoyeur.
Mains habituées à remuer la terre.
Mains pour les défunts, pas pour les vivants.
Pas des mains promptes à rédiger des romans.
Mais il doit bien y avoir quelques verrous à ouvrir chez ce brave.
Mais les préjugés s’avèrent souvent infondés.
Il est sans doute plus lettré qu’il n’y paraît.
Derrière cette visière sombre.
Je me relaxe tout à coup.
Dans mon élément naturel.
Je prends les devants, je me pose en expert.
J’aime retranscrire les émotions d’autrui.
Avec finesse bien entendu.
- Que voudriez-vous…lui écrire ?
Je peux…reformuler si besoin.
C’est…une amie de longue date ?

Poser des questions délie les langues.
Le voilà qu’il m’interroge.
Mon nom est loin d’être un sacrement.
Je ne vois pas l’intérêt de me dévoiler.
Cette part d’identité.
Je préfère rester l’anonyme du cimetière.
Seul figurant de l’enterrement de sa mère.
Je prends une gorgée de la boisson mordorée.
Je murmure presque.
- Solal Rousseau.
Et…vous ?

Il faudra bien qu’il me le donne afin que je l’inscrive en signature de sa missive.
Ce n’est pas si superflu après tout.
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